«War is the health of the state», écrivait Randolph Bourne il y a près d'un siècle. La guerre nourrit l'État. Et le goinfre ne peut s'empêcher de continuer à se gaver même lorsque le festin est officiellement terminé.
Le National Post rapportait samedi dernier que les contribuables américains continuent toujours, plus d'un siècle plus tard, à payer une taxe pour financer la guerre hispano-américaine de 1898. Cette année-là, le Congrès adoptait une taxe «temporaire» de 3% sur le coût des télécommunications. Cette industrie était alors naissante, et seuls quelques milliardaires qui possédaient l'un des 1300 téléphones au pays étaient touchés. La taxe visait à rembourser les 250 millions $ que le gouvernement avait dépensés dans cette guerre stupide et inutile (comme la plupart des dizaines de conflits dans lesquels les États-Unis ont été impliqués au 20e siècle), une guerre qui a marqué un tournant dans la mise en place d'un empire américain avec l'acquisition de colonies à Cuba, Porto Rico, Guam et aux Philippines. Les «journaux jaunes», c'est-à-dire une presse sensationnaliste qui alimentait le nationalisme hystérique d'une frange importante de la population, auraient joué un rôle important dans le déclenchement de cette guerre.
Aujourd'hui, ce sont 137 millions de lignes téléphoniques résidentielles et commerciales qui continuent toujours d'être assujetties à la même taxe, qui rapporte plus de 5 milliards $ par année dans les coffres de l'État. Des représentants au Congrès ont encore une fois présenté la semaine dernière un projet de loi qui l'abolirait. En 2000, Bill Clinton avait apposé son veto à un projet similaire. L'article explique que l'abrogation d'impôts «temporaires» a toujours été difficile politiquement. Il suffit de penser à l'impôt sur le revenu, mis en place «temporairement» par les États-Unis en 1913 et le Canada en 1917 pour financer la Première Guerre mondiale, et qui est toujours en vigueur aux dernières nouvelles.
Je l'ai écrit à plusieurs reprises au cours des dernières années: ceux qui croient stupidement qu'appuyer une guerre comme celle en Irak fera avancer la liberté n'ont rien compris à l'histoire. L'État américain s'est considérablement empiffré et a limité les libertés depuis quatre ans sous prétexte de défendre et protéger ses citoyens. Les conséquences néfastes de cet embonpoint continueront à se faire sentir pour des décennies.