En ce moment en cour fédérale, le procès qui oppose la Station Radio x (Genex) au CRTC porte sur un droit fondamental de notre société: la liberté d'expression. Or, depuis quelques jours, cette histoire va bien au-delà de cette poursuite et commence à ressembler à une offensive médiatique de très mauvais goût. De nombreux journalistes ne manquent pas une occasion de présenter les animateurs de la station comme des pollueurs d'onde qui utilisent leur micro uniquement pour se payer la tête des autres. Il ne fait aucun doute que tous ces ténors ont plutôt de la difficulté à accepter les prises de position contre les syndicats, les indépendantistes et tout ce qui anime le mouvement gauchiste. CHOI-FM est depuis sa fondation un mouton noir qui dénonce ouvertement la pensée unique dans un troupeau rempli de conformistes. Il est particulièrement honteux de voir une grande majorité d'individus demander la fermeture d'une station dont ils n'ont jamais pris le temps d'écouter les émissions. Pire encore, ils fondent leur opinion uniquement sur un ramassis d'extraits hors contexte balancés aux bulletins de fin de soirée. Faite le même exercice malhonnête avec un Gilles Proulx ou un Dr. Mailloux et je vous garantis le même résultat.
Existe-t-il deux libertés d'expression au Québec? À ce stade, je pense que la question est légitime. Pourquoi les humoristes peuvent-ils se moquer librement des gros, des laids, des vieux, des handicapés, et ce, sans que personne ne s'en offusque? Tous ces grands artistes, on les applaudit et on en redemande tellement le spectacle est drôle. Certains se souviendront peut-être du cas de la chanteuse Kathleen ou encore de la nageuse Annie Pelletier, victimes des attaques de Normand Brathwaite. Pourtant, ce dernier continue de pratiquer son métier comme si rien ne s'était passé. Que dire ensuite de Serge Chapleau qui, dans son émission Gérard D. Laflaque, ne cesse de tourner en ridicule le Canada anglais? Oh bien sûr, comme je suis bête, faire de l'humour donne droit à l'immunité au Québec. De toute évidence, nous avons un examen de conscience à faire. Si la grande majorité de la population désire une société contrôlée à l'image de Cuba, eh bien qu'on applique cette réglementation à l'ensemble des médias et qu'on cesse de favoriser un groupe plutôt qu'un autre. Qu'on exige également la modification de l'article 2b de notre Charte de droits et libertés - charte qui ressemble davantage à un vieux chiffon.
En ce moment, le CRTC se sert du dossier de CHOI-FM uniquement pour gagner l'appui de la population dans ses démarches en vue de fermer la station. Cette organisation protectionniste à la solde du gouvernement n'est certainement pas vouée à la défense de la liberté d'expression et de la libre circulation des idées. Au contraire, ces actes de censure répétés sont autant d'atteintes à la démocratie et ouvrent la porte a un dangereux précédent que nous aurions tort d'ignorer. Le mot d'ordre est clair: un animateur n'a pas le droit de prononcer un discours qui pourrait bousculer ou compromettre l'establishment. S'il ose s'engager dans cette voie, il faut immédiatement lui couper l'herbe sous le pied afin de le faire taire.
Bien sûr, pour le moment nous parlons de la fermeture d'un petit poste de radio, mais demain ce sera peut-être un journal ou encore une station de télévision. Où cela va-t-il s'arrêter? Jusqu'où êtes-vous prêt à laisser des fonctionnaires s'engager dans cette épuration des ondes? Sommes-nous condamnés à voir chaque mot, chaque parole contrôlée et examinée à la loupe?
L'État n'a pas à entrer dans la vie privée du citoyen pour lui dicter à coup de lois ce qu'il doit écouter et surtout mettre en doute son jugement critique. Ce rêve est sans doute celui de tous ces intellectuels, nombrilistes et égocentriques, qui pensent connaître la vérité et qui aimeraient surtout l'imposer à la population. Comment ces individus peuvent-ils réellement connaître ce que les gens sont, pensent et ce qu'ils peuvent croire? La liberté d'expression n'est pas réservée à une élite, mais à tout le monde et ce, peu importe leur niveau de scolarité et leur statut social. Un individu a le droit d'aller chercher de l'information et de se divertir où il veut. L'équipe de Radio X rejoint un auditoire qui apprécie son franc-parler et sa façon particulière de traiter l'actualité. Si vous êtes en désaccord et que cela ne correspond pas à vos valeurs, vous avez encore le droit de changer de poste.
Mathieu Bréard
Montréal