Cette note m'a intéressée parce que je me suis déjà posé la même question. Il y a quelques semaines, lorsque nous étions à la veille (ou à l'avant-veille) d'une élection fédérale, je me suis demandé pour qui j'allais voter cette fois-ci ou tout simplement si j'allais voter. Je ne me sentais à l'aise avec aucun des partis. Je me suis mis à faire des recherches sur les partis fédéraux et je suis «tombé» sur le site du Parti libertarien canadien. Je n'avais jamais entendu parler de libertarianisme. C'est ainsi que j'en suis venu à lire régulièrement les chroniques du Québécois Libre. J'ai encore un peu de difficultés avec la privatisation de la police... mais je peux dire que je suis d'accord avec 90% des prises de positions du «groupe». Ceci étant dit, quelle est l'utilité de prêcher aux convertis?
Il y a quelques années, j'avais un voisin avec qui il me plaisait de discuter. C'était un catholique «traditionnel» - messes en latin, confessions, exorcismes, petit catéchisme, etc. Ce qui me surprenait le plus c'est que ses plus virulentes critiques ne s'adressaient pas aux athées, agnostiques ou autres anticléricaux, mais presque exclusivement à l'Église catholique! Celle avec laquelle il partageait presque toutes ses convictions. J'avais beau lui dire qu'il me semblait plus logique d'être catholique que protestant, et plus logique d'être protestant que musulman, et ainsi de suite, pas moyen de le faire changer d'idée. Si l'on n'est pas catholique, c'est foutu. Il n'y a rien à faire. C'est la loi du tout ou rien.
Je lui ait alors soumis l'analogie suivante: supposons que vous constatiez qu'un train de marchandise de plusieurs dizaines de wagons circule en direction Est à plus de deux cents kilomètres à l'heure et que vous considériez que ce train roule dans la mauvaise direction, qu'il devrait plutôt se diriger toute vapeur vers l'Ouest, que suggérez-vous? Il n'a pas répondu directement à cette question. Mais sur le plan religieux, sa position était de considérer toute autre solution que celle de virer le train de bord tout d'un coup, subitement, insensée. Pas question de le ralentir, de le stopper, de le mettre à la renverse et d'accélérer petit à petit dans la bonne direction. Il ne voyait dans cette stratégie qu'une magouille indigne d'un vrai catholique, d'un pur. Mais il me semble que ce n'est pas possible de stopper, ou pire, d'inverser la direction d'un train de marchandise roulant à vive allure tout d'un coup!
Pour en revenir à une certaine implication politique, ne serait-il pas plus efficace, à long terme, de commencer par voter pour le parti le moins pire. De moins pire en moins pire, on finirait par se rapprocher du but. On finirait certainement au moins à cesser de nous en éloigner. Attendre que, miraculeusement, la société passe d'une lourde tendance sociale-démocrate à une tendance libertarienne sans transition me semble complètement utopique.
S'il est contradictoire pour un libertarien de s'impliquer en politique (ce que j'ai lu à quelque part sur ce site), il me semble naïf de croire que de simplement parler ou discuter sans s'impliquer pourrait éventuellement changer quoi que ce soit.
Philippe Texier
Les Éboulements, Charlevoix