L'État français vient de créer un dangereux précédent en légiférant sur l'histoire. Un projet de loi socialiste adopté par l'Assemblé nationale fait de la négation du génocide arménien un délit punissable d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 45 000 euros (environ 57 000$). En pleine campagne présidentielle, ne nous surprenons pas de voir une Ségolène Royal ou un Nicolas Sarkozy appuyer sans réserve ce torchon. L'art de la politique n'est-il pas de faire plaisir à tout le monde pour s'acheter un job?
Le pays du bon vin bascule de plus en plus dans une sorte de totalitarisme de la pensée unique. Je discutais cette semaine avec une collègue française d’origine turque qui me disait que la vérité sur ce génocide n'avait jamais vraiment été faite et qu'il subsistait encore de multiples zones grises. Son discours, malgré mes objections, ne mérite-t-il pas d'être entendu et diffusé sur la place publique? Va-t-on arrêter et traduire devant les tribunaux tous les professeurs qui ont des propos différents, voire plus nuancés sur la question? Va-t-on voir d'autres groupes se manifester pour venir pleurer à leur tour sur l'autel et exiger une loi pour sanctionner leur propre interprétation de l'histoire? Il est aberrant de constater que si on a le droit de dire quelque chose, son contraire est immédiatement un crime.
John Stuart Mill, grand philosophe du XIX siècle, dit que la volonté naïve d'interdire seulement les idées fausses implique que nous connaissons la vérité a priori, sans qu'il soit nécessaire de faire un débat. Entendons-nous bien, les politiciens français viennent simplement de se voter davantage de pouvoir pour contrôler le verbe et la virgule dans le discours des citoyens. Ils s’opposent ni plus ni moins à la liberté de conscience, édifiant eux-mêmes, à partir de principes plutôt douteux, des normes très strictes en matière de jugement.
Gardons à l’esprit que la criminalisation des mots est le commencement de la fin pour toute société qui ose encore se prétendre libre. En ce domaine, la France est déjà à la dérive.
Ce qui m'a fait le plus rire dans cette histoire c'est que la Turquie a une loi qui interdit de reconnaitre le génocide Arménien sous peine de prison(1). Les Républiques de Bananes se rejoignent dans l'absurdité!
Plus sérieusement, je ne suis pas familier avec la constitution française, mais il me semble qu'elle protège la liberté d'expression, cette loi serait donc forcément anticonstitutionnelle. N'est-ce pas?
1: http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2006/10/12/002-armenie-genocide.shtml
Rédigé par : Guillaume Filion | 13 octobre 2006 à 08h59
Je ne suis pas un spécialiste de droit français, mais leur système juridique est très différent du système canadien ou américain : les tribunaux français n'ont pas le pouvoir de déclarer une loi inconstitutionnelle.
Ce rôle est attribué au Conseil constitutionnel, une institution qui peut contrôler la constitutionnalité d'une loi après qu'elle soit adoptée, mais avant qu'elle soit promulguée par le Président. Contrairement au système canadien, un citoyen français ordinaire ne peut contester la constitutionnalité d'une loi, le Conseil constitutionnel peut être saisi seulement par certaines personnes au pouvoir, par exemple après une requête de 60 députés ou 60 sénateurs. Une fois la loi en vigueur, il n'y a plus rien à faire.
[Voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Conseil_constitutionnel_%28France%29 ]
Rédigé par : Francis Dumouchel | 15 octobre 2006 à 15h03
Excellent site, pour lequel je vous félicite. Pour comprendre comment la notion de génocide, d'extermination systématique de populations sur ordre du pouvoir, a été pour la première fois mise en pratique en France et est ainsi entrée dans l'histoire, veuillez consulter le site http://www.genocide-vendeen.com/ ou lire l'excellent ouvrage "La Vendée Vengé" (Perrin) que Reynald Secher a tiré de sa magistrale thèse de doctorat.
Rédigé par : furgole | 17 octobre 2006 à 23h07
Il se trouve, mon cher ami, que le fantôme du héros humaniste "Joseph Staline" est revenu en force dans ce pays pour hanter une grande majorité des esprits...
Sortira-t-on un jour de la torpeur ?
Un lecteur de France.
Salutations
Rédigé par : DELGADO | 30 octobre 2006 à 08h57