En réaction à mon billet d'hier sur la crise financière aux États-Unis, un lecteur m'écrit:
Vous parlez de «papier sans valeur intrinsèque (au lieu de correspondre à une matière tangible comme l'or)».
On ne peut pas soutenir cela dans une perspective subjectiviste. Il n’y a rien qui ait une «valeur intrinsèque» en dehors des préférences humaines, et le fait que quelque chose soit «tangible» ne lui donne aucune valeur. Ce sont les préférences individuelles qui donnent la valeur aux choses (que celles-ci soit faites de zéros et de uns qui soient «tangibles» ou non).
Par ailleurs, il n’y a pas vraiment de cours légal au Canada, de sorte que n’importe qui pourrait faire ses transactions en dollars US ou en or ou en mégots. La monnaie est ce que les gens acceptent comme monnaie.
Ma réponse: Le terme intrinsèque ne signifie évidemment pas ici une valeur en soi indépendante de la demande, mais justement le contraire, une valeur comme bien demandé. Le papier monnaie, lui, n'a aucune valeur en soi. Originellement, il n'était qu'un certificat promettant de remettre une certaine quantité d'or au détenteur. La demande était pour l'or, pas pour le morceau de papier.
Aujourd'hui, le gouvernement a brisé le lien entre le papier monnaie et l'or et les gens pensent que le morceau de papier vaut vraiment quelque chose. Mais comme l'a expliqué Mises avec son théorème de régression (voir cette excellente explication de Frank Shostak), il ne continue à être utilisé comme moyen d'échange que parce que tout le monde se fie sur sa valeur antérieure, et ainsi de suite jusqu'au moment où l'or n'était utilisé que comme bien de consommation (qui était sujet à une demande à cause de sa valeur comme or et non comme moyen d'échange).
Lorsqu'il s'agit de monnaie, les préférences individuelles ne sont pas totalement arbitraires. Une monnaie doit avoir certaines caractéristiques pour être une monnaie. Elle doit avoir été un objet de consommation tangible avant de servir de moyen d'échange. Il n'y a aucune demande pour des bouts de papier avec des portraits de reines ou de politiciens, pour des zéros et des uns, ni pour des mégots d'ailleurs (pour des cigarettes oui, ou des peaux de castors, qu'on peut consommer, c'est pourquoi ils ont également pu servir de monnaie là où les métaux précieux étaient difficiles à obtenir).
À cause de tout cela et de la fraude institutionnalisée qui sous-tend tout le système de monnaie fiduciaire (c'est-à-dire l'inflation et la dévaluation systématique), le seul papier monnaie qui peut survivre est celui imposé par l'État, comme ce fut le cas de la fameuse monnaie de carte de Nouvelle-France, le 2e papier monnaie au monde après celui des Chinois.
Enfin, il y a plusieurs définitions de cours légal, qui ne signifie pas qu'on doive nécessairement utiliser la monnaie nationale pour toutes les transactions, mais d'abord qu'on ne peut refuser le paiement d'une dette en monnaie qui a cours légal. Je pense qu'aujourd'hui, ce n'est pas tant cette obligation qui permet vraiment d'imposer la monnaie (ou de rendre très difficile l'utilisation régulière d'une autre), mais plutôt le fait que l'État contrôle 40% de l'économie et qu'on est obligé d'utiliser sa monnaie pour fonctionner normalement.
Faut avoir travaillé comme moi dans un hôpital psychiatrique et dans les prisons pour savoir que même les mégots ont une certaine valeur. X mégots = 1 cigarette roulée et Y cigarettes roulées = 1 cigarette manufacturée.
Rédigé par : Bruno Laplante | 07 novembre 2007 à 08h38
et le seul candidat à la présidence qui veut éliminer la Fed et rattacher le dollar à l'or et l'argent (comme cela est indiqué dans la constitution et dont la valeur précise est indiqué dans une loi toujours en vigueur datée de 1792, http://www.classbrain.com/artteenst/publish/article_131.shtml )
a amassé 4 millions de dollars en une journée Lundi
http://www.dailypaul.com/node/6126
Rédigé par : Michel | 07 novembre 2007 à 09h35
Est-ce que nos économistes sont idiots ou quoi ? Dans La Presse de ce matin:
« Deux camps s'affrontent. Le premier, dont nous faisons partie, pose une question très simple: quelle entreprise locale ou internationale désirant vendre dans toute l'Amérique du Nord va maintenant être assez folle pour s'implanter ou grandir au Canada, sachant qu'un dollar canadien hors contrôle rend son avenir financier impossible à planifier et à prévoir? Aussi bien s'installer aux États-Unis. »
C'est pas le dollar canadien qui est hors de contrôle, c'est le dollar US. Ils ne sont même pas capables d'identifier les bonnes causes. Doit-on se surprendre qu'ils proposent des solutions complètement absurdes ?
Rédigé par : Philippe | 07 novembre 2007 à 11h06
Le plus grave dans tout ça, c'est que la solution que les chroniqueurs de La Presse proposent, une monnaie unique, est à 95% un dollar américain et à 5% un dollar canadien.
Nous pourrions donc atteindre (un peu) plus rapidement le zéro absolu.
Tant qu'à faire des billets américains avec l'effigie de Laurier, je propose un personnage plus approprié: le monsieur à moustache du jeu de Monopoly.
Rédigé par : Jean-François Hébert | 07 novembre 2007 à 13h25
Où puis-je trouver l'énoncé et la démonstration du théorème de régression de Mises?
Rédigé par : David | 07 novembre 2007 à 13h47
@ David
Human Action parle du théorème de régression au chapitre 17, mais j'imagine qu'il date d'écrits antérieurs.
Je n'en suis pas un "fan" et je me demande d'ailleurs comment ce théorème s'applique au cas du suivant:
King Henry introduced the "talley stick." [aka tally stick] This was a carved wooden stick that was broken in half lengthwise. One half was kept by the Chancellor of the Exchequer and the other half was "spent" by the King. Later the halves would be matched up to prevent counterfeiting. Why you ask would anyone accept a broken stick in exchange for crops or goods of real value? What if the King only accepted those same talley sticks in payment of taxes? The king declared that only talley sticks would be accepted to pay certain taxes and if you didn't have them the king's men would knock on your door, take you away to jail by force of arms and confiscate your lands. What gave the talley sticks their value? Was it the fact that they were pretty pieces of wood or was it the fact that they were declared valuable by the king at tax time? These talley sticks circulated in England for 726 years until 1826 when the Bank of England could stand it no longer.
Rédigé par : Bastiat | 07 novembre 2007 à 15h22
"Où puis-je trouver l'énoncé et la démonstration du théorème de régression de Mises?"
Dans cette section de Human Action: "The Determination of the Purchasing Power of Money", http://www.mises.org/humanaction/chap17sec4.asp.
Rédigé par : Martin Masse | 07 novembre 2007 à 15h27
Théorème de régression: comment ce théorème s'applique au cas suivant:
King Henry and the "talley stick."
Ce bâtonnet ce n'est qu'une nouvelle pièce de monnaie. Habituellement, sa valeur est fixé en relation avec les monnaies déjà en circulation qu'elle va remplacer. Par exemple, 1 bâtonnet vaut 1 denier d'argent, ou 10 bâtonnets vaut 1 denier d'argent, ou encore 1 bâtonnet vaut 1 once d'or, ou autre.
Une fois qu'on a trouvé quelle monnaie a été remplacée, on recule dans le temps jusqu'à ce qu'on trouve la monnaie antécédente de celle-ci, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on trouve la commodité que la plus ancienne monnaie remplacait ou valait, ce qui peut-être assez difficile vu qu'il faut probablement reculer assez loin dans le temps. Mais supposons qu'on réussit, il se peut alors qu'on trouve que la plus ancienne monnaie, à ses débuts, valait disons 10 moutons ou 1 boeuf, ou que sais-je encore.
Le roi n'est là que pour assurer que la nouvelle monnaie va facilement pouvoir être échangée en tout temps pour l'ancienne ou pour quelqu'autre valeur ou bien que ce soit auquel les gens du temps accorde une valeur sûre, comme, par exemple, tant d'onces d'or pour tant de bâtonnets, ou encore la possibilité de payer l'impôt royal avec ces bâtonnets au lieu de le faire avec nos pièces d'or ou d'argent, ou nos animaux, ou nos récoltes, qu'on peut alors garder précieusement.
Rédigé par : Gerry Flaychy | 23 novembre 2007 à 23h12
J'ai trouvé sur digg ce vidéo de G Edward Griffin expliquant le fonctionnement de la réserve américaine.
http://video.google.com/videoplay?docid=6507136891691870450
Il n'y a qu'une chose je ne comprends pas dans son exemple, c'est comment la banque peut preter 10 000$ si elle en a reçu que 1000$. Peut-être que certain d'entre vous pourrait m'expliquer.
Rédigé par : Rémi | 15 décembre 2007 à 14h00
"Comment la banque peut prêter 10 000 $ si elle n'en a reçu que 1 000 $?"
La base, c'est le fait que ceux qui font des dépôts, ne les retirent pas tous en même temps, et même quand ils font des retraits, ils ne retirent pas tout.
Deuxièmement, ceux qui empruntent, généralement, ne retirent pas tout l'argent emprunté, tout d'un coup.
Troisièmement, il faut qu'il y ait un grand nombre de gens qui déposent, empruntent, font des remboursements, de façon à ce qu'il y ait toujours un certain montant d'argent liquide qui reste entre les mains du dépositaire (ici, banque) afin de faire face à la demande de fonds en liquide. C'est même calculé régulièrement par les dépositaires la quantité de fonds qui est retiré d'un mois à l'autre, de telle sorte qu'ils savent combien ils doivent garder dans leur coffres, donc combien de fois ce montant ils peuvent prêter.
Tout ceci permet aux dépositaires de prendre le risque de prêter plusieurs fois le même montant, sachant que si un déposant, ou un emprunteur, vient retirer de l'argent il ne retirera pas tout, donc que le dépositaire pourra toujours lui fournir les fonds demandés. Et même si un client demande tout, à lui tout seul, il ne peut retirer tout l'argent dans les coffres du dépositaire.
Rédigé par : Gerry Flaychy | 16 décembre 2007 à 22h09
"Comment la banque peut prêter 10 000 $ si elle n'en a reçu que 1 000 $?"
Pour compléter le réponse de Gerry Flaychy, il faut ajouter que si la banque venait à manquer de liquidité, elle peut toujours emprunter à court terme à une autre banque ou à la banque centrale.
Rédigé par : Jean-François Hébert | 17 décembre 2007 à 16h38
@Rémi
Il s'agit du système de "réserves fractionnaires", qui permet aux banques de ne garder dans leurs coffres qu'une portion des montants qu'elles prêtent. Il est fondé sur la confiance des déposants qu'ils pourront toujours retirer des fonds malgré tout, parce qu'ils ne le feront pas tous en même temps et que la banque aura toujours assez de réserves pour garantir les transactions courantes.
Dans notre système bancaire étatisé, cette confiance est entretenue et "subventionnée" par le gouvernement et la banque centrale. Par l'entremise de la Société d'assurance dépôt du Canada, le gouvernement garantit en effet les dépôts jusqu’à 100 000 $ - c’est-à-dire que si une institution financière vient à faire faillite, ce sont tous les contribuables qui vont devoir payer pour les pertes.
Par ailleurs, la Banque du Canada est toujours là pour « injecter des liquidités », comme elle le fait de façon massive ces jours-ci à cause de la crise du crédit, dans des institutions qui ont des problèmes de solvabilité. En d’autres termes, la Banque augmente la masse monétaire, dévalue la monnaie et fait payer à tous, par l’entremise d’une hausse générale des prix, les mauvaises décisions de certains investisseurs.
Ce système de réserves fractionnaires est naturellement instable et mènerait rapidement à des paniques bancaires sans l’intervention de l’État. Dans un système bancaire fondé sur le libre marché, il n’existerait pas (selon des économistes autrichiens comme Rothbard, pour qui il s’agit d’une fraude), ou à tout le moins les réserves maintenues par les institutions seraient beaucoup plus élevées (selon d’autres comme Hayek). Un équilibre concurrentiel émergerait entre les institutions plus profitables parce qu’elles prêteraient plus de fonds non adossés à des réserves, et celles qui susciteraient une plus grande confiance en gardant des réserves plus élevées.
Rédigé par : Martin Masse | 17 décembre 2007 à 18h10