Le suicide assisté fait couler beaucoup d'encre ces jours-ci à Zurich. La Suisse étant l'un des rares endroits au monde où le suicide assisté n’est pas réprimé, il s’y est développé ce que certains appellent un «tourisme de la mort». Depuis 1998, l'organisation Dignitas s'occupe de ces «touristes» désireux de mettre fin à leurs jours et qui ne peuvent le faire dans leur pays en raison de législations restrictives. Or, les pratiques d'aide au suicide de Dignitas sont désormais interdites dans les immeubles locatifs et les hôtels (des endroits pourtant privés...). Pour contourner ces interdictions, l'organisation utilise maintenant des véhicules. Dignitas a ainsi aidé deux Allemands (50 et 65 ans) à mettre fin à leurs jours dans un parc près de Zurich. Cette nouvelle méthode soulève de vives critiques en Allemagne comme en Suisse. Le premier cas de suicide s'est déroulé dans une camionnette, le second dans un véhicule de livraison, mais à des dates différentes.
Le maire de Maur (là où ces deux cas ont eu lieu) a qualifiée cette nouvelle façon de procéder de «sans piété et sans goût». «Le suicide assisté dans une voiture est une grave atteinte à la dignité humaine» a pour sa part déclaré le député Mario Fehr dans les colonnes d’un quotidien romand. Selon la Télévision Suisse, «la plupart des personnalités politiques [à droite comme à gauche] estiment que l'organisation d'aide au suicide a, cette fois, dépassé les bornes et qu'il faut désormais des lois claires pour éviter les abus». Les réactions ont également été vives en Allemagne. «Ce n'est pas acceptable et contraire à la dignité humaine», a déclaré le socialiste Dieter Wiefelspütz. Mais il n'est pour l'heure pas possible d'interdire de telles pratiques. «Celui qui veut mourir dans la nature ou dans sa voiture peut naturellement le faire», précise l'avocat général du canton de Zurich Jürg Vollenweider.
Qu’est-ce qui est moins «digne»: aider une personne atteinte d’une maladie incurable ou dégénérative à mettre fin à ses jours dans une voiture, ou la laisser mourir à petit feu dans un mouroir public engourdie par les médicaments, branchée à un appareil ou complètement sénile? Sans avoir recours aux méthodes de Dignitas, ne devrait-on pas permettre à quelqu’un qui le souhaite (et qui a de bonnes raisons de le souhaiter) de s’enlever la vie dans des lieux salubres et sécuritaires? Comme le débat sur la question du suicide assisté n’a jamais réellement eu lieu au Québec, je vois d’un bon oeil l’arrivée massive des baby-boomers à l’âge de la retraite. Ces personnes qui ont plus souvent qu’autrement vécu dans l’abondance et le confort, ne voudront pas passer les derniers mois – voire les dernières années – de leur vie malades et alitées dans des centres de soins de longue durée. Je vois d'un moins bon oeil le fait qu'ils vont sans doute réclamer l'intervention de l'État (comme ils l'ont toujours fait) pour ce faire, mais bon...
(Pour en savoir plus: «Aide au suicide: Zurich met la pression», «Autoriser le suicide assisté, mais éviter les abus», «Dignitas soulève l'indignation», «Les Suisses sont opposés au “tourisme de la mort”» et «Aide au suicide: les médecins suisses partagés».)
Le suicide assisté d'un adulte sain d'esprit et consentant (ce consentement doit être libre, éclairé et stipulé dans le contrat signé par le futur suicidé), peu importe sa condition physique, n'est pas un acte criminel.
Le suicide assisté a le même statut que les autres faux crimes sans victime comme la drogue pour adultes, la prostitution pour adultes et fumer dans les bars pour adultes. Il faut légaliser tous ces comportements!
Rédigé par : David | 13 novembre 2007 à 17h21
Je trouve foncièrement ridicule d'interdire la procédure de suicide assisté dans des lieux privés et ensuite de se révolter des endroits choisis pour "passer à l'acte". Une voiture est-elle un lieu "digne" ? C'est aux personnes qui choisissent de suivre cette voie d'en décider, pas à un quelconque bureaucrate, peu importe le poste qu'il occupe.
Rédigé par : David Lacerte | 13 novembre 2007 à 22h05
L'entre-aide, l'aide apportée à son semblable dans le besoin est certainement vertueux. Toutes les cultures, toutes les religions en font la promotion et l'encouragent. De tout temps l'être humain s'est tourné vers son semblable, soit pour l'aider soit pour demander de l'aide...et aussi pour lui faire la guerre mais ça c'est une autre histoire!
Nous connaissons l'adage «tant qu'il y a de la vie il y a de l'espoir». Je comprends, bien sûr, l'esprit de ce dicton, mais en même temps, il me rend mal à l'aise. Comme si l'espoir n'était pas un sentiment qui vient de intérieur. Comme si l'espoir ne dépendait pas de nous. Comme si l'espoir nous était accordée comme ça au gré des caprices de la nature.
Je préfère croire que «tant qu'il y a de l'espoir, il y a de la vie».
Aider l'autre ce n'est pas cultiver le désespoir de l'autre, ce n'est certes pas mettre fin à ce désespoir en niant l'importance de, ou en banalisant, l'Être et l'Existence. On ne guérit pas le désespoir de l'autre en agissant comme comme si ce désespoir devait définitivement l'emporter sur l'espoir. Mieux vaut un espoir déçu qu'un désespoir récompensé.
Au nom de l'espoir, l'aide au suicide c'est une solution finale qu'il faut rejeter. Se tourner vers son semblable pour quémander une assistance au suicide c'est demander à l'autre de partager son désespoir extrême ...mais c'est un partage impossible.
Le désespoir peut naître à tout âge, pour diverses causes. Le suicide n'a pas d'âge, le suicide a de multiples raisons, le suicide ne connaît pas de conditions sociales. Sans porter de jugement sur le suicidé, notre société considère tout de même que le suicide est un fléau qui mérite des gestes de prévention de notre part. Lorsque des personnes sont dans un cul de sac sur le plan de leur santé, le non acharnement thérapeutique est l'ultime non-geste d'amour envers son semblable complètement démuni. Le non-acharnement thérapeutique n'est pas un non-geste de désespoir. Au delà, l'Homme agit d'une manière indigne, car ce n'est pas le propre de l'Homme de désespérer.
Rédigé par : Normand Brisebois | 14 novembre 2007 à 11h39
M. Brisebois, je vais être bref. Il s'agit d'un CHOIX personnel.
« Au nom de l'espoir, l'aide au suicide c'est une solution finale qu'il faut rejeter. »
Vous semblez avoir choisi l'option X et c'est tant mieux pour vous. Je respecte votre décision. Maintenant, laissez donc ceux qui préfèrent l'option A, B ou C choisir la façon dont ils veulent en finir et ne leur imposez pas la vôtre!
Rédigé par : Hugo | 14 novembre 2007 à 13h35
Monsieur Brisebois,
Je contrebalance votre position : aider l'autre, ce n'est certes pas faire perdurer un désespoir en niant l'importance de, ou en banalisant le Non-Être et la Non-Existence. Refuser d'aider en ces circonstances, c'est demander à l'autre d'accepter le deuil de sa Non-Existence à notre place. Croyances ? Déni ? Égoïsme ? À qui doit-on vouer le plus grand respect ? À la Vie ou à l'Être vivant ? Là est la question.
En tout cas, c'est un sujet délicat. Et l'État ne fait jamais dans la dentelle. D'ailleurs, il tricote très mal : une demi-maille à l'endroit, douze à l'envers... :o))
Rédigé par : Annie Langevin | 14 novembre 2007 à 16h27