Si vous êtes du genre philosophe-geek, vous avez sûrement l'habitude de vous poser de profondes questions existentielles comme celle-ci: les superhéros sont-ils des êtres humains? Cela peut vous sembler banal ou même futile à première vue, mais prenez un moment pour penser à toutes les conséquences théoriques et pratiques de cette énigme insolite.
Après maintes réflexions, vous en arriverez sans doute à la conclusion que oui, les superhéros sont humains puisqu'ils ne représentent au fond qu'une métaphore de la différence (et parfois de l'excellence), qu'ils aient été mutants dès leur naissance ou impliqués dans un incident nucléaire fâcheux. Leur rôle étant essentiellement soit de combler notre imagination et de nous divertir, soit de nous amener à réfléchir sur des sujets tels que la justice, la sécurité, le pouvoir, la responsabilité personnelle, l'isolement, la maladie, etc. Bref, des préoccupations bien humaines.
Quoi qu'il en soit, vous continuerez peut-être de vivre dans le doute, vous réveillant en sueurs au milieu de la nuit en murmurant «et si j'avais tort? Et si j'avais tort?» sur le mode decrescendo jusqu'à ce que le bruissement des feuilles d'arbres enterre vos lamentations.
Qu'à cela ne tienne! Avant même que vous ayez pu considérer la solution consistant à réclamer une intervention publique, l'État — toujours présent pour veiller à votre bien-être — s'est avancé pour trancher cet épineux litige. En effet, la Cour américaine de commerce international, dans la décision Toy Biz v. United States (rendue le 3 janvier 2003) a définitivement écarté la plupart des incertitudes liées à ce dilemme.
Pour résumer les faits, la compagnie Toy Biz (aujourd'hui appelée Marvel Toys) fabriquait en Chine des figurines représentant les superhéros bien connus créés par Marvel Comics (Spider-Man, X-Men, Fantastic Four, Iron Man, Hulk, etc.) et les importait aux États-Unis pour la vente au détail. Dans leur infinie sagesse, les autorités fédérales américaines ont jugé pertinent d'imposer un tarif douanier sur ces objets afin de protéger l'industrie locale de fabrication de personnages de culture populaire en plastique. Évidemment, la simplicité étant une source de désœuvrement substantielle pour les fonctionnaires, on a décidé d'établir un tarif distinct pour les «poupées représentant uniquement des êtres humains» (12%) et les «jouets représentant des animaux ou d'autres créatures non humaines (comme les robots ou les monstres)» (6,8%).
Les douaniers avaient classifié les figurines de superhéros comme étant des êtres humains, donc taxés au taux le plus élevé à leur entrée à la frontière. L'entreprise Toy Biz a décidé de contester cette interprétation de la loi, d'où la nécessité pour le tribunal d'aborder notre fameuse interrogation: les superhéros sont-ils des êtres humains?
Dans sa décision, la juge en charge de cette affaire entreprend donc un examen minutieux de plusieurs dizaines de figurines et les décrit en détail. Elle en vient à la conclusion générale que les superhéros, puisqu'ils possèdent des pouvoirs spéciaux ou des traits particuliers, ne peuvent être considérés «uniquement» comme des êtres humains puisqu'ils sont davantage que cela. À noter que cette conclusion s'applique peu importe si les pouvoirs ont été acquis de façon génétique, accidentelle ou volontaire (par l'ingestion d'une potion, par exemple).
D'après cette définition, des personnages tels qu'Obélix semblent aussi se classer dans la catégorie des «créatures non humaines». Cependant, un certain doute persiste quant aux superhéros qui ne jouissent d'aucune forme de pouvoir. Pensons notamment à Batman, alias Bruce Wayne (jusqu'à preuve du contraire, la seule bande dessinée pouvant se vanter d'avoir mentionné Ludwig von Mises). Le simple fait d'être un milliardaire ingénieux suffit-il à s'exclure de l'humanité? C'est une question à laquelle devront répondre les douaniers américains lors de leur besogne quotidienne (si la loi n'a pas été modifiée depuis).
J'espère que ce cas cocasse vous aura arraché un sourire. Il s'est finalement bien terminé pour ce qui est de la libre circulation des biens, le gouvernement ayant été forcé de rembourser les sommes perçues en trop. Malheureusement, de telles absurdités persistent dans des secteurs bien plus essentiels à la vie humaine, dont l'agriculture. D'où l'importance des accords commerciaux afin d'éliminer progressivement ces règles protectionnistes et arbitraires. La liberté des échanges n'est pas qu'un beau principe, elle sauverait autant de vies à l'échelle mondiale que n'importe quel superhéros (sauf le Dr Manhattan)…
Haha, c'est probablement une des intervention étatique les plus comique qui soit! Oh well, Marvel essaie de réduire ses coûts comme elle peut. Méchant niaisage de déterminer "est-ce qu'une figurine de superhéro représente un humain".
Les taxes à l'importation sont ridicules. Si les échanges pacifique entre deux personnes d'un même pays sont bénéfique pour les deux (autrement il ne le feraient pas, c'est plate de répéter une phrase aussi simple)(deux personnes sont ami parce que ça les arrange tous les deux sinon ils ne le feraient pas, c'est pourtant tout aussi évident), mais lorsqu'il s'agit de 2 frontières ça serait différent?
Le plus pitoyable c'est que lorsque j'étais gamin (il n'y a pas si longtemps remarquez.... -_-), j'y croyais aussi jusqu'à ce que je prenne conscience des preuves historiques comme le Japon, Taiwan ou en fait n'importe quel pays qui a échangé (façon de parler puisque des pays n'échangent pas). En enrichissant nos partenaires, ils ont la possibilité d'utiliser ce capital pour le réinvestir ici ou ailleur et ainsi nous le faire bénéficier aussi. Par exemple récemment, un entrepreneur chinois a contacté le père de mon patron pour investir dans une imprimerie au Canada. (petite info : l'imprimerie se déplace aussi vers la chine mais c'est environs 4-6 mois de livraison donc encore très limité). Son but serait d'avoir un contrôle sur la production locale pour compléter leur expertise dans l'emballage. De cette façon, les travaux urgents seront fait plus localement.
C'est drôle hein... je me sens comme quelqu'un qui parle sur "pourquoi les feuilles sont vertes", il me semble que c'est tellement simple à comprendre et que le raisonnement est logique commme 2+2=4 donc 4+4=8...Pourtant l'état ne cesse de jouer la fausse carte nationaliste et décourage le libre-marché.... et plusieurs les approuvent!!
Rédigé par : Kevin | 17 août 2008 à 13h17
C'est encore plus drôle que les autobus au Chili.*
*Le Chili a récemment nationalisé le système de transport en commun qui était totalement privé. Le gouvernement chilien, voulant bien faire les choses, a commandé ce qui se faisait de mieux en autobus. Résultat, les autobus achetés par le gouvernement sont plus larges que les rues.
Rédigé par : David Gagnon | 17 août 2008 à 22h23
Francis, vous frappez avec force (et humour) dans le coeur de la bêtise fonctionnarielle lorsqu'elle se sublime par elle-même (pas besoin de directives lorsque l'on prend son travail à coeur)!
Le protectionnisme de marché ne sera toujours qu'une illusion de solution qui va à l'encontre même des tendances mondiales économiques. L'isolationnisme, un mirage de sécurité.
Vraiment, très bon billet!
Rédigé par : Ben Gbs | 18 août 2008 à 00h31
Croyez-vous qu'avec le temps et par la force des choses, la mondialisation et le marché vont causer l'érosion graduelle des pouvoirs de l'état au point de l'éliminer en bonne partie.
Les forces du marché vont-elles finir par avoir le dessus sur les moralistes, nationalistes et écologistes qui empoisonnent l'économie et la liberté ?
Rédigé par : Quand | 18 août 2008 à 10h13
Je ne suis pas certain si cette dernière question est rhétorique ou si vous souhaitez une réponse, mais voici la mienne... Personnellement, je ne crois pas à «la force des choses» (une forme de vice hégélien que je dénonçais dans un texte précédent); s'il suffisait de s'asseoir et de regarder le monde s'améliorer, ce site et la philosophie en général ne seraient que des pertes de temps.
Par contre, la plupart des gens à l'échelle mondiale semblent animés d'un désir de liberté et de prospérité. Des générations d'êtres humains croyant aux mêmes valeurs ont construit une civilisation certes bien imparfaite, mais qui a su réduire le pouvoir des despotes au point où nous pouvons jouir d'un confort indéniable. J'estime que les gens voudront poursuivre sur cette voie s'ils comprennent bien les avantages de la liberté et de la prospérité.
Bref, il faut toujours rester vigilant pour préserver les droits individuels si durement acquis au cours des siècles et continuer de les faire progresser. Sur ce point, je crois qu'on peut s'inspirer d'un principe sous-tendant l'existence des superhéros : on ne doit pas uniquement se fier aux autres pour mettre en oeuvre ses principes et contribuer au respect de la justice.
Rédigé par : Francis Dumouchel | 18 août 2008 à 18h25
@Francis Dumouchel,
Un "droit" cela n'existe pas. Tout ce qui existe c'est un rapport de force entre individus et groupe d'individus.
Cela a toujours été la loi du plus fort et ce le sera toujours.
Si vous voulez être CERTAIN de vos "droits" alors vous devez être le plus fort et plus fort que tous ceux qui désirent vous enlever vos "droits".
N'est-ce pas une forme d'handicap intellectuel de penser que la liberté ne peut exister que par le "droit" et donc que par le système étatique ?
MIGHT IS RIGHT !
Il n'y a rien d'acquis et on assiste plutôt à l'érosion des droits individuels depuis 100 bonnes années.
Et puis, à quoi cela sert-il de lutter pour faire "progresser" les droits sur des dizaines d'années alors qu'on va être MORT quand on aura le DROIT.
Je veux avoir le droit de mon VIVANT !
Rédigé par : vivant | 20 août 2008 à 12h23
@vivant
Je pense que vous allez être très malheureux si vous espérez la disparition du système étatique de votre vivant. Il a fallu des siècles pour le bâtir et, malgré les nouvelles technologies, le faire reculer ne sera pas de tout repos (vous n'avez qu'à constater la part du secteur public dans les économies développées pour vous en convaincre).
Il est vrai que le XXe siècle a été très difficile pour le libéralisme, mais il n'empêche que si vous comparez à pratiquement n'importe quelle époque de l'Histoire, nous profitons aujourd'hui (dans les sociétés occidentales) d'une grande liberté relative et d'une prospérité inégalée.
À quoi cela sert-il de clamer des slogans vides? Que proposez-vous pour mettre en oeuvre votre vision de la société à court terme? La révolution?
Rédigé par : Francis Dumouchel | 20 août 2008 à 19h43
La révolution?
OUI !!!
Rédigé par : vivant | 21 août 2008 à 12h27
C'est ça, faisons la révolution. Libérons le peuple, de gré ou de force !
LOL
Rédigé par : Jean-François Hébert | 22 août 2008 à 08h11
Eh bien moi, cela ne me fait jamais vraiment rire ce fantasme de révolution. Ce slogan éculé a aveuglé l'esprit des intellectuels des années 60-70 et n'a abouti qu'à excuser au nom d'une idéologie délirante les sanglantes didactures communistes, qui voulaient en effet faire le bonheur des peuples malgré eux. Dans les faits, les rigolos de chez nous qui soutenaient l'idée de "révolution" soi-disant au nom de la liberté appuyaient en réalité une des pires machines à tuer les libertés individuelles dans le monde.
Aujourd'hui ces libertés chèrement acquises depuis les Lumières sont progressivement rognées par une multitude de lois, de décrets, de subventions et d'interventions étatistes. Les défendre signifie en réalité se battre sur chaque balle, comme au tennis, mais surtout pas compter sur une révolution globale qui changerait l'homme.
Rédigé par : marianne | 22 août 2008 à 09h08
@Marianne,
Moi, je voudrais faire la révolution pour enlever le gouvernement du pouvoir afin que les travailleurs puissent conserver 100% de leur chèque de paie et NE PAS payer de taxes foncières sur leur propriété. Une fois que tu as acheté une maison elle est à toi et tu n'a pas à payer une rente au gouvernement.
Après que mon armée aurait décimé le gouvernement et tous les profiteurs, j'instaurerais un paradis fiscal, bancaire et entrepreneurial.
La liberté passe par le travail et non pas la spoliation.
Tu travailles ? Et bien tu conserves 100% du fruit de ton travail, voilà la vraie liberté.
Rédigé par : vivant | 22 août 2008 à 12h47
@Marianne,
"mais surtout pas compter sur une révolution globale qui changerait l'homme. "
Je ne veux pas changer l'homme, je veux juste faire la révolution pour que le gouvernement arrête de me voler mon chèque de paie, de me voler ma propriété et de menacer mes libertés.
Une révolution locale ferait très bien l'affaire, le reste de l'humanité n'a qu'à faire sa propre révolution.
Une révolution qui dirait: Les taxes FINI, les règlements et la bureaucratie, FINI.
Rédigé par : vivant | 22 août 2008 à 12h51
Alors, alleluiah, brother ...
Rédigé par : marianne | 22 août 2008 à 14h44
Je suis encore sceptique pour la révolution. Je ne vois pas comment concilier révolution avec le principe de non-agression. À moins de faire référence à des initiatives comme le Free State Projects ou le développement de l'agorisme...
Rédigé par : Gaby | 22 août 2008 à 14h53
Bonjour Gaby,
Votre questionnement est légitime et souligne votre respect de l'autre. Permettez-moi d'y apporter lumière, dans la mesure de mes moyens.
Le principe de non-agression est défini ainsi:
"Aucun individu ni groupe d’individus n’a le droit d’agresser quelqu’un en portant atteinte à sa personne ou à sa propriété." (fr.liberpedia.org/Non-agression_principle_%28NAP%29).
Quoique le principe libertarien s'applique certainement à celui qui initie l'agression, il ne s'applique évidemment pas à la victime qui utiliserait la force et la violence physique pour se défendre contre l'agression initiale (de nombreux écrits libertariens traitent en profondeur de ce sujet). Réagir contre l'agression n'est pas une "agression" en soi.
Si on comprend bien ce principe, on peut alors voir la révolution comme un geste de défense -- et non d'agression -- que des citoyens exaspérés pourraient éventuellement entreprendre pour terminer leur asservissement. En ce sens, on peut certainement concilier "révolution" et "principe de non-agression".
Souhaitons que les individus dominants de la société dit "civilisée" réparent bientôt les nombreux dommages créés par leurs gestes agressifs (économiques et politiques) avant qu'une révolution homicide ne soit nécessaire. Nosu en serions tous gagnants... eux y compris.
Rédigé par : Jean Le Moignan | 23 août 2008 à 16h08
@Gaby,
C'est Einstein lui-même qui disait que la paix mondiale n'est pas menacée par les quelques violents ou troubles-fêtes mais plutôt par la masse pacifique résiliante.
Je suis libertarien, mais je n'endosse absolument pas le principe de non-agression. Tout est PHYSIQUE et la physique implique un rapport de force dans tout et il est inévitable que cette force finisse par s'exercer tôt ou tard. C'est en dehors de la volonté humaine. C'est une règle de la nature aussi inévitable que la gravité ou le temps qui passe, le sang finit toujours pas couler, il a toujours couler et il coulera toujours.
C'est inévitable qu'il y aura des agressions, des conflits, des combats dans toute société humaine avec plus d'un individu. Je ne crois pas qu'être une mauviette soit la meilleure manière de défendre sa liberté.
Souscrire aveuglément au principe de non-agression c'est se faire ultime violence à soi-même. C'est s'agresser soi-même car c'est ce mettre à la merci de l'agression des autres.
Parfois, la meilleure défense c'est l'offense. Et pour moi, la meilleure façon de s'approcher d'une société libertarienne c'est que chacun se batte de toutes ses forces pour ses intérêts personnels.
Plus les individus sont combatifs et agressifs, plus les forces s'équilibrent et donc la tyrannie devient impossible.
Rédigé par : vivant | 24 août 2008 à 12h29