par Martin Masse
C'est dans les moments de crise que l'on peut observer si ceux qui professent certains principes y croient vraiment ou s'ils sont prêts à les abandonner à la première occasion, quand la pression devient trop forte et que l'hystérie prend le dessus sur la raison.
On a ainsi vu, suite aux attentats du 11 septembre et lors du déclenchement de l'agression américaine contre l'Irak en 2003, plusieurs libertariens abandonner leur scepticisme envers l'interventionnisme étatique et leur foi dans le principe de non-agression pour devenir des apologistes de l'impérialisme américain. Seul les libertariens associés à l'école autrichienne ont tenu le fort et maintenu une ligne antiétatiste cohérente dans ce débat.
Cette fois, c'est la crise financière qui sert de déclencheur. Comme ce fut le cas en 2001 lors de l'effondrement de la bulle high-tech, de nombreux commentateurs qui sont pourtant reconnus comme des défenseurs du libre marché deviennent soudainement partisans d'une intervention massive de l'État. Dans le National Post, le Wall Street Journal, au Cato Institute, on peut lire que la Fed se devait d'intervenir comme elle a fait en injectant des milliards de dollars dans l'économie pour empêcher les marchés financiers de s'effondrer davantage. Et que le plan de 700 milliards $ du gouvernement américain est peut-être mal conçu mais s'avère, lui aussi, nécessaire pour «maintenir la confiance sur les marchés».
Comment des gens qui prétendent défendre le libre marché et s'opposer à l'interventionnisme étatique peuvent-ils appuyer un transfert de 2300 $ de chaque Américain, enfant et adulte, vers des compagnies de Wall Street qui ont pris de mauvaises décisions? Comment peuvent-ils critiquer les socialistes sur tous les autres sujets, puis se ranger du même côté lorsqu'il s'agit de questions monétaires?
La réponse est que ces vire-capot ne savent rien, ou ne comprennent rien à la théorie économique autrichienne. Les monétaristes à la Milton Friedman, les partisans de l'économie de l'offre (supply-siders) et ceux des choix publics (public choice), tous proches de l'establishment des affaires, n'offrent aucune analyse cohérente des questions monétaires. Ils n'ont aucune opposition théorique ou de principe à l'existence et au pouvoir des banques centrales — qui sont pourtant l'équivalent de la planification centralisée de type soviétique appliquée au domaine monétaire. Sur cette question, ils diffèrent en fait très peu des keynésiens.
C'est pourquoi on observe une telle unanimité quant à la nécessité d'une intervention du gouvernement — autant la gauche interventionniste traditionnelle que les défenseurs «mainstream» du libre marché partagent la même analyse. Seuls les Autrichiens, encore une fois, ont non seulement vu venir cette crise, proposent une explication rationnelle, et s'opposent radicalement à ce que l'État intervienne davantage pour tenter de régler une crise qui découle de ses interventions précédentes.
Ces pseudo libertariens non seulement ne font pas avancer la cause de la liberté et du libre marché, mais la font reculer. Ils viennent donner raison aux gauchistes qui accusent les défenseurs du libre marché d'être contre le socialisme pour les pauvres, mais pour le socialisme lorsque ça favorise les riches.
C'est le temps de choisir son camp. D'un côté il y a les libertariens, de l'autre les partisans de Karl Marx. Je blague? Pas du tout. Ceux qui appuient ces manipulations monétaires par une banque centrale ainsi que la plus imposante appropriation de capitaux privés par un État dans l'histoire de l'humanité défendent en fait le point 5 parmi les mesures proposées par Karl Marx en 1848, dans son Manifeste du Parti communiste (on peut d'ailleurs constater que plusieurs autres de ces mesures ont été réalisées aujourd'hui…):
Le prolétariat se servira de sa suprématie politique pour arracher petit à petit tout le capital à la bourgeoisie, pour centraliser tous les instruments de production entre les mains de l'État, c'est-à-dire du prolétariat organisé en classe dominante, et pour augmenter au plus vite la quantité des forces productives
Cela ne pourra naturellement se faire, au début, que par une violation despotique du droit de propriété et du régime bourgeois de production, c'est-à-dire par des mesures qui, économiquement, paraissent insuffisantes et insoutenables, mais qui, au cours du mouvement, se dépassent elles-mêmes et sont indispensables comme moyen de bouleverser le mode de production tout entier. Ces mesures, bien entendu, seront fort différentes dans les différents pays. Cependant, pour les pays les plus avancés, les mesures suivantes pourront assez généralement être mises en application:
(…)
5. Centralisation du crédit entre les mains de l'État, au moyen d'une banque nationale, dont le capital appartiendra à l'État et qui jouira d'un monopole exclusif.
Les libertariens autrichiens sont peut-être encore une petite minorité, mais ce sont les seuls qui auront proposé une explication logique à toutes ces folies; les seuls qui pourront déclarer, la tête haute, «je vous l'avais bien dit!»; les seuls qui pourront se présenter légitimement comme les véritables défenseurs de la liberté et du libre marché.
Pfff.... personne dans les média traditionnels n'a souligné les interventions étatiques comme responsables de la crise actuelle... On se fait accuser à gauche et à droite de mauvaise foi, mais c'est tellement facile de comprendre les effets pervers causés par toutes les interventions étatiques aux États-Unis depuis plus de 10 ans!!
Au fait, je remarque que vous avez supprimé le blogue de Pierre Duhamel du blogroll depuis qu'il a carrément accusé "la cupidité des financiers" comme cause de la crise... Je vous comprends, c'est gênant de même partiellement supporter des opinions du genre. Surtout qu'il permet des interventions tellement stupides et démagogiques... j'y vais pour me divertir et lire des stupidités pour m'aider à conforter mes opinions.
Rédigé par : Kevin | 25 septembre 2008 à 23h51
@ Kevin,
"Au fait, je remarques que vous avez supprimé le blogue de Pierre Duhamel du blogroll depuis qu'il a carrément accusé "la cupidité des financiers" comme cause de la crise..."
Yep... Et il appuie le plan Paulson en plus. Pas besoin d'amis de la sorte qui virent capot et deviennent des supporters de l'étatisme à la moindre crise qu'ils ne comprennent pas. Il y a déjà assez de gauchistes illettrés économiques dans les médias sans qu'on encourage ceux qui sont supposés être de notre bord.
Rédigé par : Martin Masse | 26 septembre 2008 à 00h09
Il est sûr que si tu travailles pour TVA ou Radio-Canada en tant que journaliste pseudo-financier, tu es le premier à applaudir comme un pingouin toutes les singeries interventionnistes de l'état et à brailler comme des veaux quand il n'y en a pas.
Rédigé par : Tym Machine | 26 septembre 2008 à 00h16
Alain Dubuc dans La Presse de ce matin. Je tombe en bas de ma chaise.
"L'optimisme est possible parce qu'il y a une grande différence avec 1929... Et c'est que nous sommes en 2008. Nous avons des connaissances, et surtout, des outils, notamment l'État, infiniment plus puissants qu'il y a trois quarts de siècle"
Des outils, l'État?&%?
Il est grave ce type.
Rédigé par : Guylaine | 26 septembre 2008 à 06h21
@Martin Masse
Salut Martin. J'étais tombé sur un excellent texte assez long sur la Grande dépression il y a qques semaines sur le site du QL. Je ne me souviens plus qui l'avait composé mais je trouvais qu'il était très pertinent dans le contexte actuel. Même pour un novice (en contstante amélioration) en économie comme moi, j'avais facilement pû constater la similitude avec cet événement et ce qui se passe maintenant. J'apprécierais si tu pouvais remettre le texte en hyperlien. Je crois qu'il serait bénifique de relire ce texte (en 2 parties si je me souviens bien) afin de démontrer à quel point l'État peut dérapper, devenir totalitaire et créer plus de pauvreté lorsqu'il se sent au pied du mur.
P.S En passant, je me suis commandé des livres de Mises (PLANNING FOR FREEDOM: LET THE MARKET SYSTEM WORK et ECONOMIC FREEDOM AND INTERVENTIONISM) et Economic Science and the Austrian Method de Hans-Hermann Hoppe afin de parfaire mes connaissances.
Rédigé par : Steven | 26 septembre 2008 à 08h41
@ Guylaine :
Et surtout ne pas oublier Ben Bernanke, LE spécialiste ultime de la crise de 1929. Right...
Rédigé par : Francis St-Pierre | 26 septembre 2008 à 10h04
Steven: Google est ton ami.
http://www.google.ca/search?q=grande+d%C3%A9pression+qu%C3%A9becoislibre&ie=utf-8&oe=utf-8&aq=t&rls=org.mozilla:fr:official&client=firefox-a
Rédigé par : Rémi | 26 septembre 2008 à 11h16
Merci Rémi!
Rédigé par : Steven | 26 septembre 2008 à 12h06
Peut-on dire que Fanny et Freddy sont comme le SCHL et Genworth au Canada?
Rédigé par : steven | 26 septembre 2008 à 12h17
Eh voilà. La U.S. Treasury Mint vient de suspendre l'achat de sa pièce d'or d'une once, le buffalo. Dans combien de temps le maple leaf sera t'il suspendu?
Achetez de l'or tant que vous le pouvez!!
Rédigé par : Jean-Reno C. | 26 septembre 2008 à 22h35
Aucune incitation aux financiers à se démerder s'ils savent que l'État va venir sauver leur cul à chaque fois qu'ils seront dans le trouble.
Ce qu'ils méritent justement c'est de périr pour les erreurs débiles qu'ils ont fait. Et ils ont peut-être fait ces erreurs délibérément sachant qu'en cas de trouble le gouvernemaman serait leur "filet SOcial".
Le slogan dit "Survival of the fittest" pas "survival of the fattest".
Rédigé par : Tym Machine | 26 septembre 2008 à 23h02
Je trouve cette mesure d'un socialisme extrême, pire que de subventionner la culture.
Car dans le cas de la culture, on peut à la rigueur présumer de la bonne foi des demandeurs que l'on soit d'accord ou non avec leur art.
Tandis qu'ici, le gouvernement américain s'apprête à donner des milliards de dollars à des FRAUDEURS et des VOLEURS du système. Des gens directement responsables de leurs actions, de leur avidité.
Quand on pense que des dirigeants de ces compagnies se sont auto-octroyé des millions de dollars dans leur compte en banque personnel et on levé les feutres de leur banque juste avant que tout ne pète (sachant fort probablement exactement quand le système allait planter), je ne trouve pas leur comportement immoral, je le trouve criminnellement scandaleux, enrageant et d'une bassesse encore jusque là inégalée dans l'humanité.
Exploiter l'ignorance des pauvres gens pour se mettre outrageusement riche, voilà qui devrait logiquement en mettre en tôle pour des 25-30 ans. Or au lieu de cela, on s'apprête à leur verser 700 milliars parce que ces salauds se sont mis eux même dans la merde.
Tant qu'à cela j'aurais aimé mieux savoir que Georges W Bush allait se déguiser en Joker et garocher 700 milliards de dollars dans les bidonvilles américains.
Rédigé par : Tym Machine | 27 septembre 2008 à 16h47