par Martin Masse
Mes amis Niels Veldhuis de l'Institut Fraser et Jason Clemens, anciennement aussi du Fraser et maintenant directeur de la recherche au Pacific Research Institute de San Francisco, sont parmi les très rares économistes canadiens qui publient des analyses pertinentes et tranchées. Ils rappelaient aujourd'hui quelques faits intéressants dans un article publié dans le Financial Post. Voici des passages que j'ai traduits :
La plupart des Canadiens ne sont malheureusement pas conscients des progrès accomplis par le Canada pendant 15 ans (1992-2007) dans le sens d'une réduction de la taille de l'État. Depuis son apogée en 1992, la taille de l'État canadien - que l'on peut le mieux mesurer par les dépenses totales de tous les niveaux de gouvernement en pourcentage du produit intérieur brut - est passée de 53% à 40%, selon des données de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques. Il s'agit d'un revirement marqué par rapport aux années 1960, 1970 et 1980, alors que l'État canadien grossissait toujours plus.
Après des années de déficits budgétaires ayant mené à un sérieux problème d'endettement, les gouvernements canadiens ont commencé à diminuer leurs dépenses à partir du début des années 1990. Par exemple, le gouvernement fédéral dirigé par le premier ministre Jean Chrétien et son ministre des Finances Paul Martin a réduit les dépenses de programmes dans une proportion de près de 10% entre 1994/95 et 1996/97, celles-ci passant de 123 milliards $ à 111 milliards $.
Les dépenses ont également diminué dans plusieurs provinces aux niveaux de l'État provincial et des administrations locales. L'Alberta sous Ralph Klein a diminué ses dépenses, en tenant compte de l'inflation, de 20% entre 1992/93 et 1996/97; l'Ontario a vu les dépenses de son gouvernement et de ses administrations locales diminuer de 6% entre 1994/95 et 1997/98, alors que Mike Harris était au pouvoir; et la Saskatchewan dirigée par Roy Romanow a réduit ses dépenses de 11% entre 1993/94 et 1996/97.
À cause de ces réductions de dépenses, d'une retenue dans d'autres domaines et d'une forte croissance économique depuis le début des années 1990 (elle-même étant partiellement le résultat d'un gouvernement moins imposant), la taille de l'État au Canada est passée à 39,0% du PIB en 2007, avant d'augmenter légèrement en 2008.
Un autre aspect important de cette évolution est l'écart qu'on observe entre le Canada et les États-Unis. En 1992, la portion absorbée par les gouvernements au Canada était 36% plus grande que celle absorbée par leurs homologues aux États-Unis. En 2008, cet écart n'est plus que de 3%. En fait, si l'on tient compte du récent budget du président Obama, il est probable que le Canada aura un État plus petit que celui des États-Unis d'ici quelques années.
Si les dépenses de l'État créent des emplois et stimulent l'activité économique, comme le pensent aujourd'hui de nombreux politiciens, journalistes et militants, la diminution des dépenses publiques au Canada durant les années 1990 n'aurait-elle pas dû affecter négativement les Canadiens et leur économie?
Au contraire, à mesure que les gouvernements ont réduit et contenu leurs dépenses, une plus grande portion des ressources de notre économie est passée sous le contrôle des individus, des familles et des entreprises au lieu d'être contrôlée par l'État. Il en a résulté une économie solide caractérisée par une croissance moyenne (ajustée pour tenir compte de l'inflation) qui a dépassé celle des États-Unis et de tous les autres pays du G7 depuis le milieu des années 1990.
(...) Réduire plutôt qu'augmenter la taille de l'État est la meilleure façon d'assurer un avenir économique plus brillant. Notre propre histoire en fournit la preuve.
Ajouté à ces informations, le rapport annuel de l'institut Fraser classait la taille du gouvernement canadien en 1995 au 71e rang mondial. En 2006, ce rang avait baissé à la 49e place.
Pendant que je regarde ces chiffres, mentionnons les données sur la règlementation financière. Durant ces mêmes années, le rang du Canada concernant la règlementation du crédit et des affaires est passé de la 8e à la 16e place.
Rédigé par : John Chéreau | 29 avril 2009 à 23h02
Cet article illustre bien ce que j'ai beaucoup de difficultée a comprendre face a l'élection des conservateurs au Canada; je ne comprends pas pourquoi plusieurs libertariens ont voté conservateur lors des dernières élections alors que, dans les faits mesurables, non seulement les politiques économiques Libérales étaient plus proches de la position traditionellement libertarienne (réduction des impots plutot qu'une réduction de taxe a la consommation, controle des dépenses militaire, etc), mais du coté social aussi.
Est-ce que c'est parce que plusieurs ont votés instinctivement plutot que rationnellement? Ou bien y a-t-il une fatigue naturelle a voir un parti unique au pouvoir, peut-importe la nature des politiques proposées...
Rédigé par : JC | 30 avril 2009 à 04h45
«Est-ce que c'est parce que plusieurs ont votés instinctivement plutot que rationnellement? Ou bien y a-t-il une fatigue naturelle a voir un parti unique au pouvoir, peut-importe la nature des politiques proposées...»
Sur le plan économique, l'idéologie des conservateurs est supposée (je dis bien "supposée" ) être similaire à celle des libertariens. Cependant, dans les faits depuis quelques années, c'est tout le contraire. Plutôt que réduire la taille de l'état, le gouvernement de Harper l'a augmentée. De plus, je crois que beaucoup ont voté conservateur partiellement par désir de changement, partiellement à cause des commandites.
Rédigé par : Philippe David | 30 avril 2009 à 09h46
@JC:
J'ai voté "moins pire" aux dernières fédérales. À mon avis, c'étaient les Conservateurs, bien qu'étant totalement contre tous les partis - à gauche comme à droite - qui s'avancent avec un agenda du bien commun social et moral à imposer à la population. Et je l'ai regretté.
Le leader libéral Stéphane Dion se vantait des efforts des prédécesseurs en matière de réduction des déficits et de création de surplus.
Cependant, il se faisait le promoteur du keynésianisme, de mesures protectionnistes, d'une taxe "verte" et d'investissements publics massifs dans des projets dits verts.
J'ai voté "moins pire" en espérant qu'il n'y aurait pas de budget de stimulation économique au Canada. C'était ce que la position du chef me laissait croire, après avoir regardé le débat des chefs en français.
Les 4 leaders d'opposition voulaient des injections de fonds publics partout et surtout dans les secteurs inefficaces...bien que subventionnés depuis toujours. J'ai été naïf sur la teneur du budget...
Mais j'ai été au moins heureux de voir qu'Harper a été défendre sur toutes les tribunes le libre-échange (vs. la tentation du protectionnisme). Maigre consolation.
Rédigé par : Mathieu | 30 avril 2009 à 12h04
Dans son éditorial d'aujourd'hui, Terence Corcoran commente le discours de Stephen Harper lors d'un colloque du Manning Center for Building Democracy il y a quelques semaines, alors qu'il donnait sa définition du conservatisme en critiquant les libertariens. S'il y a des naïfs qui ont encore des doutes que nous sommes gouvernés par des étatistes...
http://www.nationalpost.com/opinion/columnists/story.html?id=f8979985-1889-44e5-a33e-6ede5c605d32
Mr. Harper's attempt to purge libertarians from Canadian conservatism reached its lowest point when he pretty much blamed libertarianism for the economic crisis. Wall Street, he implied mockingly, was the heart of libertarianism, and Wall Street and the libertarian free market tanked the economy.
"Look at Wall Street, the great free-enterprise global financial institutions that wanted so much freedom from government regulation -- they were the first in line for government support when the recession hit. And now I read that now some of them are saying they don't like that this government money may limit their freedom."
This drew laughter and applause from the Manning Centre crowd, from the few hundred conservatives in the audience. As if Wall Street bankers were libertarians. Worse, as if Wall Street bankers were libertarians who deserved to have their banks nationalized and their compensation controlled by government.
Do libertarians pose some kind of threat to the Harper Conservatives? Apparently they do, judging by Mr. Harper's attempt to eliminate them from the party. And he might be right.
Rédigé par : Martin Masse | 30 avril 2009 à 12h33
@JC
Votre deuxième hypothèse est la bonne je pense: on a voté PC parce que ça n'avait vraiment plus d'allure de voter Libéral, le PLC était corrompu à l'os et avait besoin d'un petit stage de réjuvénation. Maintenant, dire que le PLC est libertarien euh... faut pas pousser quand-même. Il n'y a pas de parti libertarien au Canada et il n'y en aura pas tant que 75% des électeurs ne refuseront pas d'aller voter pour des politiciens qui proposent touts la même marde (ce qui rend d'autant plus étrange la polarisation extrême des débats politiques ou les gens se crêpent le chignon sur des futilités).
Rédigé par : Pierre-Yves | 30 avril 2009 à 14h01
Les politiciens choisissent pour qui les gens ont le droit de voter, et comment ils ont le droit de voter.
Il n'y a pas de démocratie.
Rédigé par : Stranger | 30 avril 2009 à 17h54
Il ne faut pas non plus oublier que le dernier budget a été ainsi pour empêcher le NPD de prendre le pouvoir. Le NPD aurait fait bien pire. Sans la menace de la prise du pouvoir par la coalition les conservateurs auraient eu un budget s'accordant avec l'enonce economique qu'ils avaient fait au debut du mois de decembre. Bien que dans la recent histoire du Canada les liberaux ont ete plus responsables fiscalement que les conservateurs, le choix le moins pire en termes de politique economique aux dernieres elections etait conservateur. Pour ma part, j'ai fini de voter. Je me demande à partir de quel pourcentage d'abstention les gouvernements vont-ils réaliser qu'ils ne sont plus légitimes?
Rédigé par : D | 01 mai 2009 à 13h06
Les gouvernements se foutent d'être légitime. Ils vont rester au pouvoir tant qu'ils ne seront pas renversés, style Islande.
Rédigé par : Stranger | 01 mai 2009 à 15h04
C'est rationnellement que j'ai voté conservateur, étant donnée les libéraux qu'on a actuellement, étant donnée le bloc et le NPD. Tous des maudits partis de gauche finis qui veulent nous taxer et nous réglementer jusqu'en enfer.
Je voyais chez les conservateurs moins de taxes et moins d'impôts et oui les conservateurs ont baissé les impôts.
Par contre, les conservateurs nous ont poignardé dans le dos avec leur budget de putain destiné à plaire à l'opposition.
Rédigé par : Justin Bertrand | 01 mai 2009 à 15h42
Pierre-Yves,
Il y a un parti libertarien au Canada, voici l'adresse internet:
http://www.libertarian.ca/
Mais de toutes façons, pour ma part, j'ai fini de voter aussi.
Rédigé par : Justin Bertrand | 01 mai 2009 à 15h50
"Si les dépenses de l'État créent des emplois et stimulent l'activité économique, comme le pensent aujourd'hui de nombreux politiciens, journalistes et militants, la diminution des dépenses publiques au Canada durant les années 1990 n'aurait-elle pas dû affecter négativement les Canadiens et leur économie?"
Chacun prêche pour sa paroisse après tout.
Le principal problème d'un politicien quand il ne fait rien et laisse l'économie aller est de passer pour un sans-coeur et un insensible. On répète tellement ad noseam (le mot est faible) cette soi-disante "vérité" que tout le monde vient à en développer un réflexe d'interventionisme aigu.
L'autre corrolaire découlant de tout cela, est que si ça se met à aller mal, l'opposition blâmera un gouvernement non-interventionniste de ne rien faire face à la crise. Au contraire, si cela commence à aller bien, ça ferait bizarre de voir un gouvernement se targuer de n'avoir rien fait. On reçoit rarement du crédit pour des choses qu'on a évité de faire.
D'un autre côté, un gouvernement interventionniste pourra se targuer d'avoir sauvé l'économie si jamais une de ses interventions s'adonnait à générer ne serait-ce qu'une minuscule bonne nouvelle et cela peu importe la quantité d'effets néfastes et pervers que cette intervention aura généré. Personne ne saura ce qui aurait pu être fait avec les ressources gaspillées dans des projets non-viables et non-rentables et ce qu'on ne sait pas ne fait jamais mal.
Rédigé par : Tym Machine | 12 mai 2009 à 10h11