par Gilles Guénette
Cyberpresse.ca: Après 38 ans de loyaux services, Jean-Noël Mayrand, l'épicier de Saint-Pierre-les-Becquets, a pris sa retraite. En avril dernier, son magasin a fermé ses portes, laissant les habitants sans aucun marché d'alimentation et un édifice commercial vide en plein coeur de ce village situé au sud de Trois-Rivières. L'histoire aurait pu s'arrêter là. Mais à Saint-Pierre, on a vite compris que laisser partir l'épicerie, c'était mourir un peu.
Pour trouver un supermarché digne de ce nom, les habitants de Saint-Pierre doivent parcourir 15 km. Le village compte 1200 habitants. L'été, avec les vacanciers et quelques résidents saisonniers, il y en a quelques centaines de plus. La population est vieillissante. Certaines personnes n'ont ni voiture ni parenté pour aller acheter les provisions dans une ville voisine. Face à ce problème, la mairie a formé un comité et s'est mise à étudier la possibilité de créer une coopérative d'alimentation.
Il y a eu un grand rassemblement à l'église au printemps. «Il y avait 300 personnes : ça faisait longtemps que le curé n'avait pas vu tant de monde», confie le maire de Saint-Pierre, Jean-Guy Paré. Avec ses collègues, il a expliqué le projet. Le prix de la carte de membre a été fixé à 300$, ce qui n'est pas rien dans un village comme Saint-Pierre. Cette cotisation, que les membres ne paient qu'une seule fois, permet d'amasser une bonne mise de fonds. Assez pour ensuite obtenir des subventions et intéresser les bannières en alimentation à se lancer dans l'aventure.
Comment se fait-il qu’on ait maintenant besoin de former des coopératives et obtenir des subventions pour intéresser des entrepreneurs à investir chez nous?! Il me semble que l’entreprise privée aurait pu flairer la bonne affaire – après tout, 1200 à 1500 personnes qui doivent se nourrir tous les jours, ça compte. Eh bien non, il semblerait que le secteur n’est pas rentable. Selon Claude Savard, de la Fédération des coopératives d'alimentation du Québec, «Les marges bénéficiaires sont très minces dans l'alimentation.» Les entrepreneurs intéressés ont souvent peu de moyens, car ceux qui en ont préfèrent investir dans une aventure plus rentable. «La jeune génération n'est pas intéressée parce que ce sont des commerces qui demandent beaucoup d'heures de travail», précise-t-il.
C’est pour ça qu’on aurait opté pour une coop à Saint-Pierre-les-Becquets. «La coopérative a une patience que l'entreprise privée n'a pas», note Hélène Simard, présidente du Conseil québécois de la coopération et de la mutualité. Elle est plus patiente et plus efficace: dans une étude publiée en 2008, le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation conclut que, au Québec, les coopératives ont un taux de survie supérieur à celui des entreprises privées. Dix ans après leur ouverture, le taux de survie des coopératives est de 44%. C'est deux fois plus que dans le cas des entreprises ordinaires. À ce compte, on se demande pourquoi il n’y en a pas plus! – seulement 3200 au Québec.
Et l’enjeu était gros. «Si on avait perdu notre épicerie, on aurait été considéré comme une municipalité dévitalisée, explique le maire Jean-Guy Paré. La valeur du prix des maisons de Saint-Pierre aurait automatiquement baissé de 10% à 15%.» Ce qui n’est pas rien. Selon la journaliste de La Presse, une «municipalité dévitalisée» est une ville en perte de vitesse. Le taux de chômage y est élevé et les revenus familiaux sont parmi les plus faibles de la province. La population vieillit et les jeunes préfèrent s'installer ailleurs. Au Québec, 152 villes ou villages figurent sur la triste liste officielle des municipalités dévitalisées, que le gouvernement a établie d'après leur indice de développement.
Se dirige-t-on, comme on en a déjà fait état sur le Blogue, vers une nationalisation du réseau de supermarchés au Québec? Quoi, la nourriture est un bien essentiel, on ne peut laisser le marché décider tout seul du sort de milliers de personnes. Se dirige-t-on vers un méga-programme gouvernemental d’aide aux «municipalités dévitalisées» de la province? Ce ne serait pas surprenant, le premier ministre du Québec disait récemment qu’il souhaitait «occuper le territoire». On ne peut pas occuper le territoire si la moitié des «régions» sont fermées. Comme disent les Anglais, only time will tell…
Même phénomène dans mon village natal, ironiquement ceux qui se plaignait était ceux qui n'allait jamais a l'épicerie.
Il faut parcourir 15 km pour avoir accès un club video, quincaillerie, grande épicerie, pharmacie etc ... Je demande au gouvernement de tout nationaliser !
Rédigé par : Bobjack | 20 juillet 2009 à 12h04
Si ce n'était pas des subventions, il me semble qu'un système pareil de coop est on ne peut plus souhaitable. C'est la preuve même de la supériorité du capitalisme face au communisme. Le capitalisme permet à des individus de se regrouper et de mener à bien une entreprise qui a pour but de redistribuer ses profits auprès des consommateurs.
Le contraire est impensable.
Rédigé par : freddy | 20 juillet 2009 à 14h26
Comme dit Bobjack, c'était le même phénomène dans le village où j'ai passé 25 années de ma vie.
Les gens aimaient mieux aller magasiner en ville. Ça fait plus big et en plus ça fait sortir les ti-vieux de la place. On aime bien le dépanneur du coin très pratique lorsqu'on a besoin d'un pain ou d'une pinte de lait mais rare sont ceux qui vont y faire l'épicerie.
À ce que je sache, une coopérative peut exister dans un libre marché non? Libre aux gens d'y adhérer ou non. Si ça devient obligatoire et coercitif, alors là, on ne parle plus de la même "game" du tout mais comme c'est là, où est le problème, les gens ont le droit de s'affilier et de s'associer entre eux librement. Évidemment, si on opte pour la formule syndicale québecoise qui interdit les votes secrets alors là, on se retrouve face à des problèmes potentiels d'intimidation et de harcèlement.
Rédigé par : Tym Machine | 20 juillet 2009 à 14h54
Gilles Guénette,
C'était quoi la morale de ton article ? C'était quoi le but de ton article ?
Ton article démontre l'efficacité et la supériorité du système coopératif sur l'entreprise privée. Je ne suis pas certain que c'est ce que tu voulais démontrer.
On aurait aimé une critique libertarienne contre l'implantation des coopératives et pour le maintient de l'entreprise privée.
On aurait aimé que tu proposes des pistes de solution pour revitaliser le secteur privé et lutter contre le secteur public.
La seule raison pour laquelle les municipalités s'inquiètent de la baisse de la valeur des propriétés c'est qu'ils veulent continuer à collecter des taxes.
Ils devraient à la place abolir les taxes foncières, cela attirerait plein d'acheteurs pour ces propriétés. De plus abolir les taxes foncières ferait en sorte d'attirer de nouvelles constructions et de nouveaux investissements.
On aurait aimé que tu nous parles du rôle des taxes et des règlements (harcèlements) municipaux sur le développement économique et sur le secteur privé.
Franchement, j'ai trouvé que cet article n'avait aucun but, très décevant.
Rédigé par : Marcel Chlaman | 20 juillet 2009 à 15h01
@ Marcel Chlaman (et les autres)
Je voulais justement votre avis là-dessus. Comment expliquer la supériorité du système coopératif sur l'entreprise privée? Me semble que si c'était supérieur, ça se saurait. Je voulais montrer comment on spin des âneries sur le sujet. Je voulais que vous me parliez du rôle des taxes et des règlements (harcèlements) municipaux sur le développement économique et sur le secteur privé. Mais bon... disons que c'est pas mon meilleur billet ;-)
Rédigé par : Gilles Guénette | 20 juillet 2009 à 16h00
Les taxes et harcèlements municipaux font fuir l'investissement et contribuent grandement à la baisse du prix des propriétés. En tant qu'investisseur privé, on ne veut pas que la ville nous vole nos profits et on ne veut pas qu'elle vienne nous dire comment diriger nos affaires.
Tant que le modèle coopératif se fait sur une base volontaire des participants je suis d'accord. Mais si c'est obligatoire par la ville et qu'on sollicite des fonds publics pour le roulement de l'entreprise alors je ne suis absolument pas d'accord. Ce reviendrait à faire de la concurrence déloyale expliqué dans un billet précédent de Martin Masse.
Le modèle coopératif peut être supérieur dans la mesure où il provient de l'initiative privée et où chacun devient propriétaire de l'entreprise en achetant une part sociale et ainsi bénéficie d'un retour des profits sous forme de prix avantageux.
Mon gros problème c'est la plainte de la baisse des valeurs des propriétés et le "spin" voulant que seul le gouvernement peut et doit faire quelque chose.
Je pense que c'est bien plus les politiques fiscales et règlements municipaux qui font baisser le prix des propriétés, bien plus que l'absence d'une épicerie.
Et je pense que l'initiative privée est la meilleure pour régler ce problème.
Rédigé par : Marcel Chlaman | 20 juillet 2009 à 16h15
«Tant que le modèle coopératif se fait sur une base volontaire des participants je suis d'accord.»
Absolument. Idem pour le syndicalisme. Rien contre le fait que des gens veulent se réunir pour négocier avec leur patron -- je connais des patrons qui préfèrent négocier avec une seule personne, le représentant syndical, plutôt qu'individuellement avec chaque employé... Le problème survient lorsqu'on nous force à adhérer à quelque chose contre notre gré (comme c'est le cas au QC avec la Formule Rand).
Dans le cas de la coop de Saint-Pierre-les-Becquets, ce n'est pas vraiment le cas. Sauf qu'ils s'en servent pour aller chercher des subventions. C'est quoi, on devient tous «coopérants» dans leur machin?
Rédigé par : Gilles Guénette | 20 juillet 2009 à 16h29
Maxime Bernier rapporte un cas de coop intéressant sur son blogue: http://www.maximebernier.com/2009/07/stzacharie/
Il écrit: «Certaines personnes pensent à tort que les coopératives, c’est un mode de gestion socialiste autogestionnaire, un type d’entreprise qui contredit ou en tout cas qui se veut une solution de rechange au modèle capitaliste. Au contraire, selon moi, les coopératives ont tout à fait leur place dans un marché libre. Lorsque les membres sont libres d’y adhérer et d’en sortir, et que la coopérative se finance avec le capital de ses membres et non avec des fonds de l’État soutirés à d’autres contribuables, il s’agit de l’expression de la liberté individuelle et de l’entrepreneuriat local. C’est une solution innovatrice pour répondre à certains besoins lorsque les entreprises privées traditionnelles ne sont pas présentes dans un marché spécifique.»
Rédigé par : Gilles Guénette | 20 juillet 2009 à 16h38
Il me semble bien que le modèle coopératif (sans gouvernement) est un des meilleurs exemples du capitalisme. Une collection d'individu libre et consentant qui se mettent ensemble pour offrir un service.
Je ne comprend pas, la majorité des gauchistes penses que Coop = Socialisme, Sinon = Capitalisme.
C'est évidement la même chose pour le syndicalisme (sans formule Rand), un vrai libertarien se doit de défendre ces deux concepts, tant que la liberté y est.
Rédigé par : Bobjack | 20 juillet 2009 à 17h07
Ce que ces plaignards veulent, c'est un dépanneur avec des prix d'épicerie. Cette coopérative ne fonctionnera pas sans subvention. Je n'ai rien contre les coopératives, mais dans ce cas-ci, ça ne génère aucune efficacité. Ça finira en dépanneur avec des prix de dépanneur.
p.s. Moi je viens d'un village de 850 habitants, où les gens font spontanément 15km de voiture pour pas mal moins important que l'épicerie.
Rédigé par : Bastiat79 | 20 juillet 2009 à 22h31
A la limite, je serais pour UNE dépense 'pour capitaliser' des écoles et hopitaux/cliniques régionales qui se forment en coop... et ce, de la part du gouvernement. Ensuite, c'est: "débrouillez-vous"...
Ça te ferais fondre les budgets du ministère central de la maladie et de la paperasse (min. de la santé) et du monopole de l'abrutissement de masse et de la 'réunite' aiguë(min. de l'éducation)...
Mais des subventions pour démarrer des coops locales dans un domaine qui n'est pas/n'était pas étatique... j'ai de sérieuses réserves. Très sérieuses.
ôÒ
Rédigé par : Sébas | 20 juillet 2009 à 22h31
J'ai peut-être une solution pour les gens de Saint-Pierre-les-Becquets;
Voici un brouillon de 'plan d'affaire';
Qu'ils s'inspirent des gens de Guyenne en Abitibi (un lieu que nous pouvions définir comme étant 'dévitalisé') et qu'ils partent une coop et construisent leurs propres serres.
---» http://www.mrcabitibi.qc.ca/chic.htm
Ensuite, qu'ils démarrent un petit marché public et invitent les producteurs du coin à vendre leurs fruits/légumes.
Finalement, qu'ils commencent aussi à vendre des produits laitiers et du pain dans un petit local adjacent au petit marché public.
Voilà. Et tout ça SANS subventions ?
Reste à vérifier si tout ça est faisable dans cette localité (et éventuellement 'exportable' dans toutes les localités 'dévitalisées' du Québec?).
-signé:
Un libertarien à votre service
p.s.
J'ai appris une nouvelle expression inventée par nos chers technocrates (qui cherchent toujours de nouvelles façon de dépenser -oups;'investir'- l'argent des contribuables):
-"municipalités dévitalisées"
On arrête pas le 'progrès'...
Rédigé par : Sébas | 20 juillet 2009 à 22h51
Finalement, s'ils ne demandent pas de contribution gouvernementale, ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent de leur argent mais ça serait très très surprenant qu'au fil du temps et des "écarts entre les revenus et les dépenses" nous ne devenions pas des "souscripteurs involontaires" (comme dans le cas de GM) via l'État québécois. Ça sent déjà le vol planifié de nos impôts.
Une coopérative n'est en gros qu'une société où les souscripteurs ont droit à une ristourne s'il y a des profits ou doivent éponger les pertes s'il y en a. Ça ressemble à un gros Costco avec carte de membre etc. mais à la différence que Costco, lui, ne demande pas d'aide gouvernementale; au contraire, il doit vivre avec les élucubrations des fonctionnaires étatiques qui l'empêche de vendre son essence moins cher que les autres à SES propres membres! Une monstruosité!
Rédigé par : François 1 | 21 juillet 2009 à 04h46
Ma copine a fait des études de géographie en Europe.
Dans le cadre d'un cours universitaire, ils ont fait un stage de terrain dans un secteur justement "dévitalisé".
Comme il ne restait qu'une boulangerie dans un village visité, le professeur a obligé chacun de ses étudiants à aller y acheter quelque chose.
Ainsi, pensait-il, c'est en forçant tout le monde (les étudiants) à y aller que le coeur du village allait survivre.
La même logique devrait être appliquée aux habitants du village: la commune ou l'État devraient forcer les habitants (par des incitatifs ou par des contraintes fiscales?) à faire la queue devant le seul commerce du coin.
Miam, de la coercition à son meilleur... Mais que faire si la nourriture y est mauvaise? Si vous êtes en éternel conflit avec le propriétaire? Pourquoi devrait-on vous forcer à y aller?
--
Le pire, c'est que bien des villages vont renaître et se repeupler naturellement au fur et à mesure que l'aire des banlieues sinon l'aire de la campagne récréative (cette campagne dont on veut profiter pour être près de la nature et pour faire des loisirs - ex.: Brome-Missisquoi) vont prendre de l'expansion dans un régime où chacun est libre d'acheter la terre qu'il veut et d'en faire ce qu'il veut*.
*lire: dans un régime où la loi sur la protection des terres agricoles n'existerait pas.
Rédigé par : Mathieu | 21 juillet 2009 à 07h37
Le pire dans tout ça?
C'est que l'exode rural et la dévitalisation de ces municipalités sont encouragés par -au moins- 4 lois.
Mathieu a en nommé une. Selon moi, le gros problème de cette loi, c'est qu'elle INTERDIT les petits producteurs de moins de 300 acres de pouvoir se bâtir une maison et une grange !
Une autre loi néfaste est celle sur les fusions municipales, qui aida à vider les régions rurales peu peuplées et incita les citoyens à se regrouper dans les centres régionaux.
Peut-être que nos technocrates pourraient se sentir utiles en demandant un assouplissement à certaines de ces lois ?
1- permettre aux producteurs laitiers et/ou de volailles possédant moins de 5 vaches et/ou 100 poulets (?) de produire et vendre hors quotas.
2- permettre à ces municipalités d'offrir moins de service (si c'est ce que les citoyens désirs et ce, pour payer moins de taxes... et relancer l'économie)
3- permettre les fermes de 100 acres ou plus.
Rédigé par : Sébas | 21 juillet 2009 à 22h52
TOUT s'organise pour FERMER les villages et bientôt les petites villes.
Les gouvernements font des lois qui favorisent les GROS et qui détruisent par la suite. Ex: les producteurs agricoles se font couper des avantages acquis et se font imposer des lois IMBÉCILES de fonctionnaires qui ne connaissent RIEN.
Depuis les années 60, les gouvernements ont même donnés des subventions pour que la populations de certains rangs quitte pour le village ou la ville.
Ce n'est pas d'aujourd'hui que le système est enclenché et ça va continuer.
Rédigé par : Fern | 29 juillet 2009 à 12h48
Tout à fait d'accord !
Par contre, il ne faut oublier la monnaie de 'Monopoly' (*) (comme dans monopolisation), qui favorise, tout autant, la concentration des capitaux et des gens...
2 'forces' qui agissent contre les individus et les 'petits' acteurs du libre marché...
(*)
Saviez-vous qui a inventé ce jeu ? Et sur quels principes était-il basé ?
Et finalement, avez-vous entendu parlé d'une des nouvelles versions de ce jeu? Il n'y a plus d'argent de papier, uniquement de l'argent électronique !
---» http://www.hasbro.com/games/kid-games/monopoly/default.cfm?page=Products/Detail&product_id=19783
Coïncidences que tout ça? Peut-être, mais les parallèles que nous pouvons tirer avec la réalité que nous vivons, sont nombreux.
Rédigé par : Sébas | 29 juillet 2009 à 14h25
Le système de coopérative à libre adhésion est-il si éloigné du capitalisme ?
Le mot "Compagnie" vient de compagnons artisans qui unissaient leurs efforts pour atteindre la prospérité. Ils pouvaient embaucher des travailleurs pas nécessairement actionnaires et vendaient aux clients, actionnaires ou pas.
Rédigé par : Red fox | 01 août 2009 à 14h37