par Gilles Guénette
Rue Frontenac publiait lundi un portrait du milieu des arts visuels au Québec. Un milieu qui, comme on s’en doute, en arrache. On peut y lire, entre autres, que «dans les communautés anglophones, la culture de l’art est plus ancienne et les gens sont plus portés à faire des acquisitions en tant que patrimoine, un objet qu’ils veulent laisser en héritage à leurs enfants. Cette culture n’est pas encore suffisamment encrée (sic) chez les francophones.» Il s’agit de Rhéal Olivier Lanthier, de la galerie Art Mûr, sur la rue Saint-Hubert à Montréal, une des plus grandes galeries privées au Canada qui compte huit salles d’exposition et qui représente trente artistes. La solution à cette distinction bien francophone? L’État doit intervenir et investir.
Ainsi, selon Christian Bédard, directeur du Regroupement des artistes en art visuel (RAAV), le marché des arts visuels est une industrie très fragile, un marché très fluctuant qui a un besoin criant d’aide gouvernementale. «Rien ne bouge, regrette-t-il. Les galeries doivent défrayer des coûts énormes, années après années, pour la commercialisation à l’extérieur, dit-il, pour participer aux grandes foires. Mais la plupart d’entre elles n’ont pas les reins assez solides pour le faire longtemps. La Sodec dépense une fortune pour faire parler du cinéma québécois, mais pour l’aide aux galeries d’art, il n’y qu’un maigre 250 000 dollars de disponible. Il faudrait multiplier ce montant par quatre.»
Comment se fait-il que les Québécois francophones ne peuvent rien faire sans une aide de l’État? Les peintres ont besoin d’un coup de pouce pour trouver des galeristes. Les galeristes ont besoin d’un coup de pouce pour développer des marchés. Les Québécois ont besoin d’un coup de pouce pour acheter des toiles. On se demande comment l’économie fait pour fonctionner dans la Belle Province tellement les Québécois semblent incapables de faire quoi que ce soit sans un coup de pouce le l’État.
Il ne faut pourtant pas se surprendre d’une telle situation. Le milieu des arts visuels s’est en quelque sorte retiré du marché dans les années 1960, préférant faire affaire avec des fonctionnaires chargés de redistribuer des fonds publics plutôt qu’avec de vrais clients ayant de vrais goûts. Et l’État – avec ses nombreuses interventions visant à «démocratiser» la culture – nous renvoie le même message depuis plusieurs années: la culture doit être «gratuite», c'est-à-dire payée par la collectivité… Or, une bureaucratie ne forme pas un marché et ce qui appartient à tout le monde n’appartient à personne.
Une éventuelle aide de l’État ne créera pas de marché pour les galeristes. Elle gardera en vie, à tout le moins, quelques galeries qui sans cette aide fermeraient possiblement leurs portes. Avant de réclamer de l’argent du gouvernement, les galeristes devraient s’interroger sur leurs façons de faire. Non mais vous avez visité une galerie récemment? Les oeuvres sont inabordables! On vend des toiles de peintres inconnus plusieurs milliers de dollars. Peut-être que s’ils réduisaient leurs prix un peu, ils auraient moins de difficultés à arriver et plus de Québécois achèteraient de l’art.
En 1981, je m'étais trouvé un job à mopper les planchers au musée des beaux arts de Montréal.
Dans la galerie moderne au dernier étage, était présenté "une oeuvre", prenant tout un mur, de mémoire, une quinzaine de pieds linéaires, ou plus.
l'oeuvre consistait en trois petits carrés d'environ 20cm de côté. L'un était placé parallèle au mur et peinturé en noir, celui d'un côté était incliné à environ 15 degrés, et l'autre avait subi une rotation verticale d'environ 15 degrés. Les parties des carrés dépassant le plan du centre étaient peinturées en noir, les autres en blanc. Le titre de l'oeuvre était à peu près - intersections de plans - .
C'est merveilleux de voir l'expression de la prise de conscience profonde de l'artiste... ça correspond à la capacité de conceptualisation spatiale (3D) d'un étudiant très moyen de secondaire III de l'époque. Aujourd'hui, avec tous les jeux vidéos, un enfant de cinquième année adepte de jeux vidéos 3D considèrerait ceci comme trivial.
La vraie question est: qu'est-il passé par la tête des curateurs pour allouer tant de surface de mur dans un endroit dispendieux comme le musée des beaux arts de Montréal pour une "oeuvre" si conceptuellement triviale?
Rédigé par : Jean Côté | 02 décembre 2010 à 12h59
@ Jean Côté
Et ils ont dû payer cette «oeuvre» une fortune!
Rédigé par : Gilles Guénette | 02 décembre 2010 à 13h31
Jean Côté soulève un bon point, il y a bien plus de travail intellectuelle dans le plus cheap des jeux vidéos (texture, modélisation 3D, son, détection de collision, intelligence articielle, programmation etc ...) que dans toutes les oeuvres d'art du monde puissance 1000. Pourtant c'est pas de la "vrai" art.
Tant qu'a moi le mot Art est un mot qui ne veut absolument rien dire.
En quoi le fait de peindre/faire de la musique est si spécial par rapport à ce que je viens de nommer ? Franchement quelqu'un qui fabrique des modèles réduit avec tout les détails qui vont avec et la mécanique m'impressionne 1000 fois plus que n'importe quel tache de peinture sur une toile.
Rédigé par : bobjack | 02 décembre 2010 à 17h16
Le tatouage c'est de l'art :DDDD!
J'y pense, je n'ai pas rencontré les gens du QL depuis longtemps, vous resteriez surpris, j'ai maintenant le bras droit au complet de coloré :DD
Plus sérieusement, c'est un secteur artistique qui est complètement boudé par l'état et donc nécessairement se développe de façon beaucoup plus harmonieuse et originale. Le tatouage en tant que tel n'est que la surface des arts corporels, le peintre Shawn Barber par exemple est absolument excellent et fait des séminaires dans beaucoup de conventions à travers le monde. Paul Booth et Filip Leu ont démarré le art fusion experiment et aujourd'hui, les studio de tatouage servent aussi de galeries d'art. Le studio Légend'art à Montréal par exemple est basé sur un mix entre les arts corporels et visuels.
C'est une des choses qui me prouvent que l'intervention de l'état dans tous les domaine est néfaste. Les style de musique les plus marginaux offrent aussi des mélodies particulièrement originales. Remarquez que chaque style trouve son public mais l'état ne devrait justement jamais rien avoir à faire avec le financement de tout ce qui est culturel.
Rédigé par : Kevin | 02 décembre 2010 à 18h18
L'art contemporain c'est l'art de faire croire à des "critiques d'art" et à des "spécialistes" qu'un objet quelquonque est une oeuvre qui vaut une fortune.
Rédigé par : Louis | 07 décembre 2010 à 17h49
Voici trois étapes à suivre pour augmenter le nombre de collectionneurs d'arts au Québec:
1) les artistes réduisent le prix de leurs oeuvres, histoire d'attirer une plus grande clientèle (c'est pourtant pas sorcier ça...)
2) le gouvernement réduit les taxes aux particuliers de 50%, afin d'augmenter le revenu disponible à l'achat d'oeuvres d'arts
3) le RAAV lance une campagne publicitaire intitulée "Pour un Québec riche et prospère!" qui vise à promouvoir l'entreprenariat, l'image des millionnaires, et l'importance de la création de la richesse dans une société (y'a plus d'anglophones qui achètent de l'art... duh!)
Rédigé par : Christian aux USA | 01 janvier 2011 à 12h38