par Pierre-Guy Veer
Bonne nouvelle! Il n'y a aucun risque que les États-Unis cessent de rembourser leur dette! En effet, Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale, affirme qu'il ne suffit que d'imprimer plus d'argent. Bien que ce type de discours ne soit pas surprenant venant d'un ancien de la Fed, il l'est venant d'un économiste de sa trempe. En effet, l'impression massive de billets de banque n'a jamais causé autre chose que des problèmes.
L'exemple classique des méfaits de l'impression d'argent est la République de Weimar. Suite à la Première Guerre mondiale, l'Allemagne s'était fait imposer le versement d'immenses compensations punitives parce qu'elle était supposément la seule responsable du conflit. Comme les montants devaient être payés en marks-or, il ne pouvait y avoir que deux façon de payer : augmenter les impôts ou imprimer de l'argent. Berlin a choisi la seconde option, et ce fut un désastre.
Entre août 1922 et novembre 1923, soit un peu plus d'un an, la quantité de marks en circulation a été multipliée non pas par deux, 10 ou 100, mais par 7,32 milliards. Comme pour tout autre bien, un surplus d'offre entraîne une chute de son prix. Dans le cas de la monnaie, augmenter autant son offre fait qu'un billet perd rapidement de sa valeur, à chaque jour.
L'hyperinflation allemande a été stoppée lorsque le Rentenmark a été adopté, remplaçant l'ancien Deutsche Mark. Le Rentenmark, puisqu'il avait sous garantie des biens industriels réels, a rétabli la confiance des gens et des marchés et ainsi freiné l'hyperinflation.
Encourager les mauvais investissements
Toutefois, l'impression massive de billets ne cause pas nécessairement d'hyperinflation, comme c'est le cas au Japon. L'inflation depuis avril 1991, époque à partir de laquelle la Banque du Japon a commencé à diminuer son taux directeur, n'a jamais vraiment dépassé les 2 %. Malgré tout, la croissance économique est demeurée anémique durant cette décennie, qui fut qualifiée de perdue. Même à ce jour, la confiance des entreprises n'a jamais atteint le sommet (sur une période de 30 ans) de 1989.
Pourquoi une croissance si faible? Suivant la logique keynésienne, le Japon aurait dû renouer avec la croissance dès l'instant où la Banque du Japon a diminué son taux directeur. Cela encourage les banques à prêter et les consommateurs à consommer. Si c'était si facile, alors la République de Weimar serait vite devenue une puissance mondiale, de même que la Russie et le Brésil dans les années 1990.
La croissance faible vient justement du taux d'intérêt ridiculement bas qui persiste dans l'empire du soleil levant depuis presque 20 ans. L'école autrichienne d'économie, dont l'un des principaux représentants est Ludwig von Mises, nous enseigne que les cycles économiques sont causés principalement par les banques centrales qui manipulent les taux d'intérêts. Sans une telle institution, le taux d'intérêt représente l'équilibre de l'offre et de la demande d'épargne. Les entreprises investissent donc selon les préférences des consommateurs; un plus bas taux d'intérêt montre que les consommateurs consomment moins et épargnent plus (ce qui augmente l'offre de crédit), et vice-versa.
Toutefois, quand les taux d'intérêts sont artificiellement diminués, ce signal disparaît. Les entreprises engagent donc des investissements qui ne sont pas nécessairement supportés par de l'épargne. Plus les taux d'intérêts sont maintenus trop bas pendant longtemps, plus les erreurs se généralisent, que ce soient des entreprises qui augmentent trop leur capacité de production sans que la demande le justifie ou des banques qui prêtent à des emprunteurs insolvables.
Cette croissance économique est donc illusoire, comme ce fut le cas aux États-Unis jusqu'à l'éclatement des bulles technologiques et immobilières en 2000 et 2008, respectivement. Quand les bulles éclatent et qu'une récession se pointe, il n'y a qu'une chose à faire: ne rien faire. En effet, il faut permettre à l'économie de recouvrer seule son équilibre sans que le gouvernement n'intervienne. Sinon, une récession devient une dépression ou, dans le cas du Japon, deux décennies perdues.
Voilà donc ce que Washington devrait faire pour revigorer l'économie américaine : ne rien faire, ou plutôt cesser d'intervenir dans l'économie comme il le fait. Le problème actuel d'endettement est uniquement provoqué par des dépenses indues; elles ont augmenté de façon presque constante depuis 1965, contrairement aux revenus.
Comme imprimer plus d'argent n'est pas une solution viable, il faut donc que le gouvernement fédéral respecte l'esprit de sa propre Constitution et cesse de dépenser là où il ne devrait pas (éducation, routes, assurance-santé, caisse de retraite, etc.). Oh, il est certain que ça va faire mal pour un certain temps. Mais comme l'a démontré Warren Harding pendant la récession très profonde de 1920-21, laisser l'économie se stabiliser par elle-même est la meilleure des solutions. Sa décision de ne pas intervenir pour relancer l'économie - il avait même diminué les impôts et coupé les dépenses - a permis à cette dernière de reprendre du poil de la bête en moins de deux ans.
"Oh, il est certain que ça va faire mal pour un certain temps."
Les baby-boomers en ont profité pendant toute leur vie.
Maintenant on nous demande de payer pour leur excès et leur mauvais jugement.
Non merci.
Rédigé par : Loi101 | 22 août 2011 à 10h07
Loi101:
"Les baby-boomers en ont profité pendant toute leur vie. Maintenant on nous demande de payer pour leur excès et leur mauvais jugement."
Vous avez parfaitement raison de relever ce paradoxe et cette injustice.
Nonobstant, c'est bien ce qui va arriver parce que - si j'en juge par la popularité du vote "de gauche" chez les jeunes Québécois - votre génération n'a pas compris que voter pour des politiciens qui proposent de vous acheter avec votre propre argent ne peut que mener à une telle impasse.
Alors tant pis pour vous... :-)
Rédigé par : Pierre-Yves | 22 août 2011 à 11h10
Je suis d'accord avec Pierre-Yves. Cela fait longtemps déjà que les baby boomers ne sont plus les seuls à voter. Les nouvelles générations ne donnent aucun signe de vouloir autre chose que continuer sur les bases de l'état-providence et en profiter à leur tour. Eux-mêmes ne font ainsi que repousser aux générations suivantes le prix à payer.
Quand on est et libertarien et baby boomer et qu'on a vu avec (au choix) désaccord / incompréhension / colère / impuissance grossir le système et qu'on le voit maintenant vouloir se perpétuer, c'est très, très désagréable, croyez-moi.
Rédigé par : Marianne | 22 août 2011 à 11h57
"Les nouvelles générations ne donnent aucun signe de vouloir autre chose que continuer sur les bases de l'état-providence et en profiter à leur tour. Eux-mêmes ne font ainsi que repousser aux générations suivantes le prix à payer. "
Encore une fois, les générations avant nous n'ont pas voulu changer. Elles ne veulent encore pas changer. Pourquoi ça serait à nous de payer le prix? Soit qu'on coupe *beaucoup* pour tout le monde, où sinon on continue comme c'est parti. Moi aussi je suis capable de profiter de ce qui reste comme les plus vieux ont fait.
Un exemple parfait: Les postes gouvernementaux.. On juge qu'il faut couper car il y a beaucoup trop de postes à rien faire, donc on coupe par attrition. On attend les retraites et on ne remplace pas les postes.
Donc, ce qu'on nous dit:
"Pendant des années, les employés gouvernementaux se sont pognés le cul. (trop d'employés pour la quantité d'ouvrage) Et ils vont continuer à le faire jusqu'à ce qu'ils jugent qu'ils en ont profité assez. Mais pour vous, ça ne fonctionnera pas comme ça."
Qu'on tue les syndicats, qu'on enlève les nombreux avantages sociaux et fonds de pensions illimitées aux plus vieux, et peut-être les générations plus jeunes vont vouloir en faire plus.
Nous ne sommes pas aveugles, nous voyons les vieux en profiter en nous laissant la marde...
Encore une fois, non merci.
Rédigé par : Loi101 | 22 août 2011 à 13h41
@Loi101:
Si vous voulez un exemple de ce qui va réellement arriver quand les finances publiques frapperont le mur, regardez la Grèce. La seule différence c'est que les Québécois ne sont pas du genre à descendre dans la rue. La solution réaliste et durable serait en effet de sabrer dans les dépenses, mais vous savez tout aussi bien que moi que ça ne ce fera pas, la facture étant simplement refilée au générations suivantes sous forme de dette jusqu'à ce que le château de cartes finisse par s'effondrer.
Prenez par exemple le récent exemple du financement par les contribuables de la fécondation in-vitro: vous trouvez ça raisonnable? Vous trouvez ça sensé? Vous trouvez ça juste? Probablement que non, et moi non plus. Pourtant, c'est exactement ce qui a été décidé parce que les lobbies ont beaucoup d'énergie pour influencer des politiciens qui n'ont rien de mieux à faire... et donc vous allez continuer à vous faire fourrer.
Rédigé par : Pierre-Yves | 22 août 2011 à 13h49
Si cela peut vous amuser, il y a eu pire. Beaucoup de gens de la génération de mes parents ont eu accès après la 2ème guerre mondiale à des avantages considérables en termes de retraites et d'avantages sociaux alors qu'ils n'avaient pratiquement jamais cotisé. Je parle de la France en l'occurrence mais quelque chose me dit que la situation est comparable au Québec et dans la majorité des pays occidentaux socialisants.
A titre personnel, je serais ravie que les fonctionnaires, qui en France partent en retraite avec quasiment 100% de leur dernier salaire, voient le montant de celle-ci diminué d'autant qu'ils ont pu la prendre plus tôt que les employés du privé après avoir bénéficié de la sécurité de l'emploi tout au long de leur carrière quelle qu'ait été leur productivité ou leur assiduité. Je ne mentionne pas les avantages qui vont avec (par ex. mutuelle santé à vie couvrant 100% de toutes les dépenses de santé, alors que les retraités du privé ne bénéficient que de la couverture de base, soit environ 65% des frais dans le meilleur des cas, augmentée éventuellement de maigres quoique coûteuses mutuelles).
Mais, voyez-vous, les syndicats sont là et veillent au grain. Les timides tentatives dans ce sens de quelques gouvernements ont immédiatement déchaîné des grèves massives et, curieusement, l'hostilité de l'ensemble de la population en dehors de quelques libertariens. Trop de gens ont intérêt à ce que cela continue. Comme dit un de mes amis, aujourd'hui presque tout le monde "en croque" ou veut en croquer.
Vous pouvez toujours espérer une fin précoce de la génération du baby boom - une épidémie peut-être ? - mais en réalité une solution significative consisterait déjà à arrêter l'hémorragie à partir de maintenant. Ce n'est déjà pas rien.
Rédigé par : Marianne | 22 août 2011 à 14h18
http://www.youtube.com/watch?v=i-g2iGskFPE&feature=share
Rédigé par : Pierre-Yves | 23 août 2011 à 16h48
@Pierre-Yves:
Merci du lien.
La « classe » complète que donne le « maître » De Gaulle est également disponible sur le site Web de l'INA. (J'emploie ces termes très pédagogique car, clairement, il s'était bien organisé pour que ses points de presse ressemblent à cela - voyez encore ce à quoi ressemble bien des cours magistraux en France, le professeur enseignant sur son petit estrade).
Je trouve du réconfort à entendre cela (une politique monétaire basée sur l'or) de la voix d'un homme vu comme un grand sage - peut-être aussi à cause d'une propagande favorable et d'un mythe créé autour du personnage - par plusieurs de nos contemporains.
Cependant, on trouvera objet à le critiquer dans sa « politique des revenus » (si je me souviens bien du nom qu'il lui donne) qui consiste, comme actuellement, à prendre à ceux (entreprises) qui ont du succès et des bénéfices, et à verser leurs deniers confisqués abondamment dans les mains de ceux qui ne fonctionnent pas.
Rédigé par : Mathieu | 23 août 2011 à 23h53