Il y a ensuite les carrés verts, légèrement moins collectivistes que les carrés rouges – ils prétendent aussi que l'éducation est un droit –, qui approuvent la hausse des frais de scolarité et la bonification du programme de prêts et bourses tout en s'opposant aux boycotts, dont les votes sont peu démocratiques.
Bref, dans les deux cas, nous avons deux factions étatistes qui justifient le rôle du gouvernement dans l'éducation. Elles sont d'accord pour que les contribuables paient leur éducation – seule la proportion change –, bien que les frais semblent sans influence sur le taux de diplomation et qu'une injection massive de fonds publics n'a, au mieux, qu'une influence non significative sur les résultats. Pour utiliser la terminologie d'Ayn Rand, ce sont des altruistes, des gens qui utilisent les autres à leurs fins.
La faction de la liberté
C'est pourquoi il est plus que temps pour qu'un autre groupe voit le jour: les pas-de-carré. Qui sont-ils? Ce sont des gens qui s'opposent à toute ingérence du gouvernement dans l'éducation et qui veulent donc l'abolition du ministère de l'Éducation. Ce sont des gens qui considèrent l'éducation pour ce qu'elle est: une marchandise. Ce sont des gens qui sont conscients que la meilleure façon de décider de la répartition d'une marchandise, c'est par le marché, c'est-à-dire par les décisions des huit millions de personnes vivant sur le territoire du Québec. Ce sont, comme les carrés verts, des gens qui s'associent volontairement et n'exercent aucune coercition les uns sur les autres. Enfin, toujours comme les carrés verts, ce sont des gens qui croient que des boycotteurs n'ont aucun droit de bloquer l'accès aux cours des personnes qui veulent y assister, même si une assemblée qualifiée l'a décidé. Après tout, c'est le consommateur individuel qui choisit ou non de boycotter une marchandise; un groupe n'a aucun droit de l'empêcher de la consommer, surtout pas au nom de la « solidarité ».
Cesser de biaiser les choix
En considérant l'éducation comme une marchandise, il est facile de comprendre l'effet d'une intervention du gouvernement. En effet, comme tout prix plafond – dans ce cas-ci, les étudiants ne paient pas le prix réel de leurs études –, les consommateurs ont une forte incitation à consommer le plus possible. En « consommant » plus d'études, le marché se retrouve donc saturé de diplômés dans des domaines aux débouchés limités – sociologie, théâtre, sciences politiques. La note est évidemment refilée aux contribuables.
Si, ainsi que le prétend la CLASSE, moins d'étudiants se retrouvent sur les bancs suite à une hausse des droits de scolarité, c'est donc signe que lesdites études n'en valaient pas la peine. En d'autres mots, la dépense encourue par trois années de bac n'aurait pu être remboursé par un travail convenable. Cela a donc diminué le gaspillage encouru par des frais trop bas; gaspillage qui serait encore plus réduit si les frais étaient laissés à eux-mêmes.
Mais le gaspillage n'est pas unidimensionnel. Il ne faut pas oublier les prêts et bourses, qui sont la prochaine bulle. La même logique que les frais minimes s'applique: quand le gouvernement change les incitations, les gens, qui sont rationnels, changent leur comportement pour en profiter. Dans le cas des prêts et bourses, des gens qui n'auraient autrement pas accès à des prêts y ont « droit », ce qui augmente leur dette et limite leur capacité future de payer (et celle des contribuables). On subventionne ainsi encore plus les études, avec des résultats mitigés.
Les demandes
Voici donc les principales demandes des pas-de-carré (elles varient d'une personne à l'autre, puisque ce n'est pas un groupe homogène):
- Abolition du ministère de l'Éducation et congédiement de tous ses fonctionnaires (avec compensation s'il y a un contrat).
- Abolition du programme des prêts et bourses.
- Abolition du REÉÉ (régime enregistré d'épargne étude). On n'a pas besoin d'un autre programme d'épargne; si une personne veut étudier/veut que ses enfants étudient, l'épargne ordinaire suffit.
- Abolition de toute forme de subvention à l'éducation à tous les niveaux, du primaire à l'université. Si l'éducation est si « payante », alors la dépense sera vue comme un investissement et se fera sans arrière-pensée.
- Affectation de la moitié des surplus dégagés au remboursement de la dette et l'autre moitié à des réductions d'impôts.
- Abolition de l'âge obligatoire pour les études. Ainsi, les adolescents qui n'ont pas d'aptitude pour étudier pourront intégrer le marché du travail quand bon leur semble.
- Abolition de la syndicalisation obligatoire des enseignants, de leur sécurité d'emploi automatique et de leur ancienneté en béton. Désormais, la compétence primera avant tout, et l'État ne dictera pas ce qu'un enseignant peut ou ne peut pas donner comme note.
- Abolition des commissions scolaires. Ces monstres bureaucratiques ont davantage leur intérêt à coeur que celui des élèves. Si des gens veulent regrouper certaines écoles pour mieux gérer les ressources, grand bien leur fasse.
Oui, ces demandes sont radicales. Oui, ces demandes provoqueraient des perturbations à court terme si elles étaient mises en oeuvre, et certaines personnes risqueraient de souffrir beaucoup. Mais malheureusement, le statu quo (avancer vers le mur au même rythme), ou pis l'accélération de la cadence vers le mur, est inacceptable. Plus on attend pour faire les réformes, comme ce fut le cas du dégel soudain des droits de scolarité, plus elles seront douloureuses. Des pays comme l'Estonie ont effectué des coupes profondes dans les dépenses publiques et s'en portent nettement mieux que la plupart des autres pays industrialisés. Ceux qui, comme la Grèce, n'ont pas réformé leur économie, s'enfoncent de plus en plus dans le marasme économique – le Japon s'y trouve depuis 20 ans. Sans le secours financier de 8G$ par année envoyé par le reste du Canada, le Québec serait exactement dans la situation de la République hellénique.
Évidemment, comme les pas-de-carré ne croient pas en la violence, vous ne les verrez pas en train de bloquer un pont, fracasser les vitrines d'une agence gouvernementale ou envoyer des sauterelles dans le local d'un groupe marxiste. Il faut plutôt changer les mentalités. C'est cette idée qui doit revenir au galop au Québec si l'on veut que la Belle Province cesse d'être dans les bas-fonds des classements économiques et sociaux et cesse de ressembler au monde d'Atlas Shrugged. C'est cette idée que les pas-de-carré veulent propager.
Amants de la liberté, antagonistes de l'étatisme et sceptiques de l'interventionnisme, unissez-vous! Propagez les idées de libertés, montrez aux gens que l'État est le problème et non la solution, lisez et parlez de Mises, Rand, Smith, Bastiat, Say et tous ces auteurs qui ont montré au monde le vrai visage de l'interventionnisme et ont expliqué pourquoi la liberté est la seule solution de rechange. Portez une simple épingle anglaise vide ou un carré d'identification vide pour montrer votre attachement à la cause de la liberté et montrer que vous refusez que l'État contrôle votre destinée.
me permettez-vous de former un groupe de libertarien et de manifester pour ces mesures, je pense que l'éducation doit changer aussi. Une manière d'enseigner pour tous sans tenir compte des différentes manières d'apprentissage qui permettent à certains de performer sous des conditions différentes de la majorité. Je crois profondément en ces valeurs.
Rédigé par : christophe Bernard | 19 octobre 2012 à 10h49
À la base, l'éducation est subventionnée à cause des externalités positives, c'est-à-dire que le bénéfice social est supérieur au bénéfice privé. Par exemple, un étudiant aura un bénéfice privé d'avoir une éducation en ayant un meilleur salaire, mais la société en profitera aussi indirectement parce qu'il y est fort probable que cet étudiant ne devienne pas un voleur. Ainsi, puisque le coût social est supérieur, la logique économique nous indique que l'offre du marché ne sera pas suffisante et que l'éducation doit être subventionnée pour compenser la défaillance du marché. Toutefois, il est important de souligner que 1. Les externalités ne résultent pas toujours en défaillances du marché et que 2. Les bénéfices sociaux diffèrent d'un type champ d'étude à un autre.
1. Il faut distinguer entre une externalité à la marge pertinente et une externalité infra marginale. Une externalité à la marge va résulter en une défaillance du marché alors que l'externalité infra marginale ne résultera pas en défaillance du marché. Ainsi, si l'offre d'éducation contient seulement des externalités infra marginales, il n'y a aucune défaillance et il n'est pas justifiable pour l'État de subventionner l'éducation. Par exemple, qu'il y a des bénéfices sociaux à ce que tout le monde ait un éducation minimum équivalant à la sixième année, mais qu'il n'y en aient pas après cela et que naturellement les gens n'abandonnent jamais l'école avant la deuxième année du secondaire, alors il n'y a pas de défaillance du marché, parce que l'externalité est infra marginale.
2. S'il y a des externalités au point d'équilibre (ce qui reste à prouver), il faut subventionner les champs d'études en fonction de leurs externalités. Par exemple, un étudiant en micro biologie qui risque de découvrir plus tard un médicament aurait beaucoup d'externalité positive pour la société alors qu'un étudiant en science politique qui risque de devenir un manifestant et briser des vitres aura beaucoup d'externalité négative sur la société. Ainsi, l'État devrait subventionner les étudiants en micro biologie et augmenter artificiellement le coût pour les étudiants en politique pour en diminuer la demande.
Avant que l'État comment à subventionner, il faut d'abord identifier s'il y a une défaillance du marché, puis identifier quel champs d'études devrait être subventionnés et quels champs d'études devraient être 'taxés'. Avec le chaos social crée par les étudiants en science sociale au printemps dernier, il me semble logique que l'État devrait tout faire en sont pouvoir pour restreindre l'accès aux études aux sciences sociales.
Rédigé par : Dmitri | 19 octobre 2012 à 11h20
La défaillance présente dans l'éducation, c'est qu'on encourage trop les études supérieures au détriment des études techniques, ou même du travail manuel.
Le marché reste encore le meilleur endroit pour décider quel type d'éducation (si l'éducation est nécessaire) est le meilleur
Rédigé par : Pierre-Guy Veer | 19 octobre 2012 à 11h55
Bon, voilà un bon début (au sujet de la partie "demandes"), mais il faudrait aussi supprimer le gouvernement au complet.
Rédigé par : David Gendron | 19 octobre 2012 à 15h48
Dmitri, j'ai rarement lu dans ce blogue un tel ramassis de conneries idéologiques comme votre dernier commentaire.
Rédigé par : David Gendron | 19 octobre 2012 à 16h09
"c'est-à-dire que le bénéfice social est supérieur au bénéfice privé"
Comme la plupart des décisions individuelles.... mon boss a démarré son entreprise, le bénéfice social est largement supérieur au bénéfice privé.................
Wow je suis brillant!
Rédigé par : Kevin | 19 octobre 2012 à 16h12
David Gendron,
faudrait être plus précis dans votre critique. Notez aussi que les exemples ne sont que des exemples pour illustrer ce que j'explique. Pour le reste, la théorie est juste.
Rédigé par : Dmitri | 19 octobre 2012 à 17h29
Kevin,
c'est le rationnel utilisé par l'État pour subventionner l'éducation et les entreprises.
Rédigé par : Dmitri | 19 octobre 2012 à 17h31
"mais il faudrait aussi supprimer le gouvernement au complet"
je suis pas anarchiste, alors j'hésite grandement sur ce point
Rédigé par : Pierre-Guy Veer | 19 octobre 2012 à 19h50
On peut faire dire tout et n'importe quoi aux "externalités". Je vous recommande de lire un peu sur la position autrichienne sur le sujet, que vous êtes libres de critiquer par la suite.
Rédigé par : Etienne Bernier | 19 octobre 2012 à 20h02
Dmitri
"c'est le rationnel utilisé par l'État pour subventionner l'éducation et les entreprises."
Et c'est évidemment de la bullshit, rien de mieux qu'un sophisme.
Rédigé par : Kevin | 22 octobre 2012 à 15h42
Dites moi, d'où tenez-vous ce beau langage et cette capacité de discuter, d'analyser? Des cours absolument inutiles pour le marchés et qui seraient abolis si ce n'était que du financement individuel ou privé? L' "ingérance" du gouvernement c'est rendre accessible l'éducation au niveau financier, accessibilité, contenu et choix de cours... Première fois que j'entends ce discours au Québec! Je pensais que cette idéologie n'était présente qu'aux USA ou autre pays de droite. La réalité est que cela créera un plus grand écart tout en abolissant la possibilité de faire carrière dans un domaine moins lucratif. Un jeune homme américain m'a dit: "ici tu as un passe temps pour te rendre heureux et ton emploi pour rapporter l'argent. Tout doit être en fonction de rapporter de l'argent. Même le choix du sport sans risque (il me parle de patin à roue alignés) car tu ne peux pas te permettre de manquer de revenue". Il tentait de m'expliquer à quel point nous sommes chanceux au Québec d'avoir accès à des études sans trop s'endetter et un système de santé pour tous. Il m'expliquait à quel point il aurait aimé faire une autre carrière mais n'aurait pas pu payer ses études ni avoir des assurances pour payer les accouchements de sa future. Mais, oui vous avez surement raison. Retirer l'ingérance du gouvernement ferait en sorte que seul les métiers qui sont utiles et rentables pour rembourser les frais de scolarités seraient choisis. On se porterait beaucoup mieux!!
Rédigé par : Marie | 09 novembre 2012 à 00h14
« Je pensais que cette idéologie n'était présente qu'aux USA ou autre pays de droite. »
Comique. Surtout le vague « autre pays de droite ». On dirait que vous évoquez l'enfer !
« La réalité est que cela créera un plus grand écart tout en abolissant la possibilité de faire carrière dans un domaine moins lucratif. »
Un « écart » entre quoi et quoi, exactement ? Et qu'entendez-vous exactement par « possibilité de faire carrière dans un domaine moins lucratif » ? La majorité des diplômés en sciences humaines finissent par faire « carrière » dans un domaine qui n'a strictement rien à voir avec leurs études.
« Il tentait de m'expliquer à quel point nous sommes chanceux au Québec d'avoir accès à des études sans trop s'endetter et un système de santé pour tous. »
Hmm. Rien n'empêche votre mystérieux « jeune homme américain » de venir s'installer au Québec, s'il trouve ça tellement merveilleux...
« Retirer l'ingérance (sic) du gouvernement ferait en sorte que seul les métiers qui sont utiles et rentables pour rembourser les frais de scolarités seraient choisis. »
Ce ne serait peut-être pas si dramatique... Par ailleurs, qu'en savez-vous ? L'érudition, le savoir et la connaissance pure sont-ils vraiment impossibles en dehors de l'université-providence ? Et puis quelle « carrière » voulez-vous bien mener avec un diplôme de sciences humaines très fortement dévalué ? Militant professionnel ?
Rédigé par : B. Vallée | 09 novembre 2012 à 17h39
Le commentaire de Marie semble droit sorti du livre de culte officiel des étudiants grévistes et de leurs professeurs. Phrases floues évoquant les vilains Etats-Unis, diabolisant la droite sans plus de précision, affirmant le droit indiscutable des étudiants à étudier aux frais du contribuable dans des domaines sans débouchés.
C'est de la bigoterie, comme autrefois quand les gens parlaient du Bon Dieu. Je trouve d'ailleurs toujours amusant que ceux qui n'ont pas de mots assez durs pour fustiger la bigoterie religieuse l'appliquent eux-mêmes à propos des nouvelles vaches sacrées que sont les "droits" (à la santé, à l'éducation), ou l'écologie, ou l'altermondialisme par exemple.
Pour en revenir au commentaire de Marie, en quoi est-ce mal de penser que l'utilisation des ressources d'un pays doit tenir compte d'une finalité économique ? Un étudiant désireux de se lancer dans des études pour sa culture peut économiser ou trouver un prêt personnel s'il est motivé. En général il trouve bien de quoi se payer un téléphone intelligent coûteux et d'autres gadgets.
Cette notion qu'un gouvernement doit dépenser sans compter et que la logique économique serait taboue est directement issue de l'endoctrinement subi par les élèves dès le jardin d'enfants depuis bientôt trois générations.
Au passage, je ne peux pas m'empêcher de rigoler à l'évocation de l"ami américain" en admiration devant la santé gratuite au Québec. Encore faudrait-il y avoir accès ! Sa blonde a peut-être payé cher pour accoucher aux E-U mais au moins aura-t-elle réussi à être suivie pendant sa grossesse.
L'expérience des pays communistes, qui mène à la faillite, montre que le tout gratuit est toujours synonyme de pénurie.
Les libertariens ne doivent pas avoir peur de réfuter systématiquement ce genre de prêchi-prêcha sans bases solide.
Rédigé par : Marianne | 10 novembre 2012 à 04h38
à Marianne
Comme des milliers de « carrés rouges » qui ont déferlé bruyamment dans les rues de Montréal, le printemps dernier, Marie est pour la protection étatique du droit (qu'elle voudrait incontestable) au statut d'étudiant prolongé...
Rédigé par : B. Vallée | 11 novembre 2012 à 08h19